Je ne l’ai pas choisie, cette solitude.
Je ne me suis pas réveillée un matin en me disant :
« Et si je devenais une ombre parmi les vivants ? »
Non.
C’est venu doucement, comme une peinture qu’on étale en couches,
une toile triste dont on ne peut plus effacer les traces.
Ce matin-là, ma sœur dormait encore à mes côtés.
Elle m’avait serrée contre elle,
comme si tout allait bien, comme si le monde était à sa place.
Mais au fond de moi, un cri silencieux me disait :
« Ne t’attache pas. »
Je me suis levée sans un bruit,
regardant ce visage calme, paisible,
fort et vivant.
Et moi ? Vide, étrangère à moi-même.
Parfois, je me demande…
Si on m’avait vraiment écoutée, si on avait tendu la main plus tôt,
est-ce que tout aurait pu être différent ?
Mais à quoi bon parler quand chaque mot dérange ?
Quand ouvrir son cœur, c’est montrer sa faiblesse ?
Quand on te traite de victime alors que tu te noies en silence ?
Je ne suis pas née muette.
C’est la vie qui m’a volé ma voix.
Il y a eu des mains tendues.
Mais toujours trop tard.
Toujours après la chute, jamais avant le choc.
Un jour, ma tante a essayé.
Elle m’a proposé une sortie, le soleil sur le visage,
disant :
— « Tu devrais voir un peu le monde, Henriel. Ça te ferait du bien. »
J’ai fait semblant de ne pas entendre.
Elle a souri, doucement, mais dans ma tête, Amélie murmurait :
— « Ils veulent ton retour pour leur confort, pas pour toi. »
Alors je suis restée enfermée.
Et elle est partie.
Une autre fois, ma cousine est venue, une boîte de chocolats à la main.
— « Je sais que tu ne m’aimes pas trop, mais j’ai pensé à toi. »
Le chocolat a fondu dans ma paume,
mais je ne le sentais même pas.
Oui, certains ont essayé, sincèrement.
Mais après tant de rejets, de silences,
je ne savais plus comment recevoir l’amour.
Je savais juste qu’il fallait fuir.
Amélie, elle, n’a jamais quitté mes côtés.
Elle me protégeait, me rappelait que j’étais spéciale,
que les autres ne comprendraient jamais.
Alors je me suis recroquevillée,
pas par choix, mais pour ne plus souffrir,
pour ne plus risquer d’être abandonnée.
Aujourd’hui encore, j’entends leurs voix.
Dans la pièce d’à côté, ils parlent de moi.
Ils chuchotent, ils prient, ils espèrent me “récupérer”.
Mais que veulent-ils vraiment ?
Récupérer ce qu’ils ont ignoré ?
Ce qu’ils ont fui ?
Moi, je ne sais même plus qui je suis.
J’aimerais pouvoir dire que je veux changer.
Mais au fond… je ne sais même pas comment.
🕊️ À suivre…

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