Pas de vêtements, pas de souvenirs,
juste une douleur que je traînais comme un bagage que personne ne voyait.
On m’a accueillie avec des sourires.
Pas ceux qui réchauffent,
ceux qu’on sert par politesse, pour faire bonne impression.
J’étais censée me reconstruire ici.
Ma sœur me l’avait promis.
Elle m’avait dit :
— Tu verras, tu vas être bien.
Mais elle ne savait pas.
Personne ne savait.
La maison était belle. Trop belle.
Tout était bien rangé. Trop bien.
Et moi, j’étais le désordre qu’on avait essayé de cacher dans une pièce.
Il y avait des règles.
Des “bonjour”, des “merci”, des silences polis.
Mais pas de regards. Pas d’écoute.
Juste des horaires à respecter, des rôles à jouer.
Au début, je me suis tue.
Comme toujours.
Mais même le silence dérangeait ici.
— Tu pourrais faire un effort.
— Tu veux qu’on t’aide, oui ou non ?
Je voulais juste qu’on me voie.
Mais j’étais de trop.
On ne me frappait pas. Non.
C’était plus subtil.
Les phrases qui tranchent.
Les regards qui jugent.
L’indifférence qui étouffe.
Alors Amélie revenait, souvent.
Dans ma tête.
Elle me disait :
— Tu vois ? Tu n’as pas ta place. Tu n’en auras jamais.
Je me suis renfermée.
Mais j’ai changé.
Pas guéri.
Juste durci.
Je me suis construit une carapace.
Pas par choix.
Par survie.
J’ai appris à mentir :
— Oui, je vais bien.
J’ai appris à sourire sans y croire.
À paraître occupée, même quand je me noyais.
La douleur ?
Je l’ai rangée dans une boîte.
Une boîte que je n’ouvre que la nuit, quand tout le monde dort.
Je ne suis plus la même.
Quelque chose en moi s’est figé.
Mais dans ce froid, j’ai trouvé une force.
Une rage sourde.
Une promesse intérieure :
Plus jamais je ne laisserai quelqu’un me briser.

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