Serafim s’était attendu à beaucoup de choses en descendant dans la cave de son frère. Avoir Anastasiy faire une réaction faisait partie de ses calculs. Découvrir des pierres capables de fonctionner comme des noyaux n’en faisait pas partie. Avoir deux yeux qui le fixaient sous un bureau, ça n'en faisait pas partie non plus. Surtout quand les dits-yeux clignèrent, seulement pour se rouvrir ailleurs.
“Maou.”
Aucune bouche n’était visible, mais Serafim était certain que ce bruit venait des deux yeux.
“Mais qu’est-ce que t’es, bordel de merde ?”
Nouveau clignement des yeux, avec un nouveau déplacement, et Serafim se demanda s’il pouvait ignorer quoi que cette chose soit. Cependant, avant qu’il ne puisse peser le pour et le contre, les deux yeux se rapprochèrent de lui. Surpris, Serafim se recula alors que la masse noire se glissa de sous le bureau, avant de prendre une forme de chat. Bien que la forme ressemblait bien à celle d’un chat, il manquait certains détails. Le plus flagrant était l’uniformité de la masse. Il était impossible de différencier les pattes lorsque la créature était en position assise. De même, il n’ y avait pas de moustache et aucun poils, seulement une espèce de vapeur noire. Avec précaution, Serafim approcha sa main de la masse noire et le caressa. Cependant, au lieu d’avoir une sensation de douceur, il eut l’impression de passer sur de l’eau.
“Me dis pas que Stacie a trois familiers,” gromela Serafim en fixant l’espèce de chat, qui se mit à vibrer, sans doute pour imiter les ronronnements d’un vrai chat.
Personne ne savait pour quelle raison un morceau du noyau se détachait pour donner un familier. Pendant longtemps, on avait cru que la puissance en était la cause. Mais lorsque des personnes avec un noyau inactif avait obtenu des familiers, cette théorie fut rejetée.
Jamais personne chez les Dralyon n’avaient eu de familiers. Que ce soit leur père, qui avait vécu tellement longtemps. Que ce soit Ewald, qui avait poursuivi la quête de la Connaissance, ou lui, qui possédait le plus de magie, aucun d’entre eux n’avaient eu de familiers. Qu’Anastasiy en ai deux été déjà surprenant, alors un troisième…
“Maou.”
La voix, semblable à celle d’un chat, le tira de ses pensées. Baissant les yeux vers la créature, Serafim vit une des pattes du chat disparaître sous le bureau, avec un angle qui n’avait rien de naturel. Rapidement, le bruit d’un papier frottant le sol empli la pièce. Serafim hésita à regarder sous le meuble. Cependant, il n’avait pas confiance en la masse noire et décida de la garder à l'œil. Vaguement, il se demanda sur combien de mètre pouvait s’étendre la créature, le bruit ne semblant pas se rapprocher.
Comme pour le contre-dire, la patte du chat surgit de sous le meuble, le papier retenu par ses griffes. Jetant un coup d'œil vers la créature, Serafim approcha doucement sa main du papier. Alternant entre la créature et le papier, il remarqua qu’il s’agissait d’une enveloppe. Seulement, les griffes du chat se plantèrent encore plus fermement dans le papier. Immédiatement, il stoppa tout mouvement. Son regard or fixa celui voilé de l’amas noir, qui le fixait à son tour.
“Maou.”
Dirigeant sa main de nouveau vers l’enveloppe, il la stoppa de nouveau en voyant les griffes se contracter de nouveau. Doucement, il déplaça sa main vers la masse et commença à la caresser. S'aplatissant légèrement sous sa main, Serafim avait l’impression de toucher de l’eau. La brume noire s’accrochait à sa main comme les poils d’une bête. Avec le même bruit qu’un flan agité, la créature reprenait sa forme de chat, bien que les vibrations le déformaient encore un peu. Petit-à-petit, les griffes se retractèrent alors que la créature se collait de plus en plus à sa main. Tandis qu’il continuait de caresser l’amas noir, Serafim se pencha vers l’enveloppe, la saissant rapidement. Cependant, une fois en main, il ne cessa pas de caresser la créature, ne sachant pas comment elle réagirait.
Avisant la chaise, Serafim saisit le chat et le posa sur ses genoux, avant de reprendre ses caresses, au plus grand bonheur de l’amas noir. Une fois certain que la créature ne lui ferait rien, Serafim se concentra sur l’enveloppe.
Immédiatement, il reconnut le papier utilisé par le Duché pour les communications officielles, tout comme le cachet de cire. Avec un froncement de sourcil, il se demanda comment Anastasiy avait mis la main là-dessus. Seul leur père ou lui pouvaient les utiliser.
“Détache. Ouvre.”
Sous l’effet de sa magie, le sceau de cire se détacha de l’enveloppe, puis s’ouvrit. D’une main habile, il sortit les papiers qui se trouvaient dedans et les déplia. Immédiatement, il fut assailli par des chiffres et des calculs, le tout agrémenté de dessins. Cependant, il reconnut des Mots Sacrés, ce qui lui fit définitivement monter les sourcils. Il savait qu’Anastasiy n’était pas sous la protection d’un dieu, puisque le jour du Ilknur, il avait été présent. Cependant, il se rappela que c’était aussi à cette époque-là que son petit-frère commença à se distancer de la famille.
“Et évidemment, je ne vais pas pouvoir questionner le prêtre… Fais chier !,” grommela-t-il.
Tout en feuilletant les documents, Serafim se rappela des évènements d’il y a cinq ans, quand l’Empereur tomba dans un coma magique. Le premier ministre, depuis devenu Vice-Empereur, avait accusé la Théocratie de Nulvon d’avoir attenté à la vie de l’Empereur et avait voulu commencer une guerre. Fort heureusement, les autres nobles avaient réussi à stopper cette folie. A la place, les frontières avec Nulvon avaient été fermés et les Temples avaient l’interdiction de venir dans l’Empire. Et bien sûr, leur famille avait été obligée d’obéir.
Cependant, à défaut de pouvoir questionner le prêtre en charge du Ilknur, il allait pouvoir interroger le récepteur de ce paquet.
“Sorley, à la muraille d’Eamon, hein ?”
Comments (2)
See all