A la différence de son jumeau, Serafim n’avait jamais été particulièrement intéressé par la quête de la Connaissance. Pour lui, l’Art du Combat avait été bien plus important, son désir de protéger sa famille étant plus fort que tout. Ayant appris à manier sa magie à la Tour, comme toutes personnes désirant s'aventurer dans ce domaine, il avait naturellement dû suivre les deux années générales obligatoires avant de pouvoir se spécialiser. Cependant, il aurait pu se passer de cela, puisqu’il avait un professeur. Mais ce dernier et son maître d’armes avaient jugé bon de lui faire faire ses deux années. En voyant Ewald s'agiter comme ça à la mention d’un parfum qu’aucun d'entre eux ne pouvait sentir, sauf Anastasiy, il regrettait un peu son choix.
“C’est le kroseil. C’est à cause de ce fruit que tu n’es pas sûr.”
A l’entente de ce fruit inconnu, Serafim chercha dans sa mémoire une quelconque mention faite, que ce soit par son professeur, son jumeau ou Jason. Cependant, il dû s’avouer vaincu et se jura de fréquenter la bibliothèque de ses frères après son retour de la Muraille.
“... Oui. Mais… Stacie… d’où tu tiens ce genre d’information ?” Demanda Ewald.
Serafim fronça les sourcils en sentant la Demande de Vérité cachée dans les mots de son frère. Il n’avait aucune raison d’avoir recours à ce sort, et surtout pas sur leur petit frère, sauf si… Tirant mentalement la grimace, Serafim sut tout de suite que la conversation sur le kroseil n’allait pas lui plaire, et visiblement, son père partageait son opinion au vue de son poing sur l’accoudoir.
“D’un livre se trouvant dans la cave il me semble ? Mais je serais incapable de te dire lequel,” s’excusa-t-il.
“Ce n’est pas grave. Juste… dis-moi quand tu t’en souviendras.”
“Seulement si tu me promets que je n’aurais plus à boire ce genre de choses,” répondit Anastasiy, le visage sérieux en pointant la fiole vide qui se trouvait entre les mains de Veronica.
“Je vais voir ce que je peux faire pour le goût,” dit Ewald, un sourire réapparaissant sur son visage.
“C’est mieux que rien,” déclara-t-il en tendant sa main vers son frère, qui la prit pour sceller leur Accord.
Un mince anneau doré apparut autour du poignet d’Ewald, alors que celui d’Anastasiy était plus grand. La taille indiquait le niveau d’importance de la demande de celui qui la formulait.
“Est-ce que tu veux aussi un Accord pour nous expliquer c’est quoi le problème avec le kroseil ? Ou tu préfères un Serment ?” Questionna Seraphim, qui avait l’impression de louper quelque chose d’important.
“Je préfère ne rien vous dire.”
“Ewald, tu n’as pas le choix. Sinon, c’est moi qui explique,” déclara Anastasiy, à la surprise de tous.
“Que-Pourquoi ?!”
“On vient de passer un Accord alors que je t’ai dit où tu pouvais trouver le livre en question. De plus, la valeur est disproportionnée et personne n’a protesté, toi le premier. Pourtant, tu devrais le savoir mieux que quiconque, l’importance de l’équivalence,” expliqua-t-il à son frère, qui avait blêmit à mesure des explications.
La règle d'équivalence faisait partie des trois règles dites de “politesse” dans les Cercles magiques. Tout acte magique demandait un échange de même valeur, soit-il sous une forme matérielle ou abstraite. De plus, les pratiquants devaient respecter les règles de l'honnêteté, où aucun secret ne devait être dissimulé, et du secret, où aucune vérité ne devait être énoncée. Pour beaucoup, ce paradoxe était le résultat du Déluge Écarlate, l’ultime acte d’Awyll avant qu’il ne soit scellé pour toujours à l'Est. De ce fait, le non-respect de ces règles n'entraînaient pas des conséquences immédiates, mais le cumul pouvait représenter un danger. Bien sûr, cela n’était qu’une hypothèse, peu osant abuser des règles, de peur que cela libère Awyll de sa prison.
Mais à cet instant précis, Ewald ne pensait pas aux conséquences de s’être fait avoir par son petit frère ou à une possible libération d’un dieu. Tout ce qu’il pouvait voir était que leur duché, et peut-être même le pays lui-même, avait été empoisonné au kroseil. Et il n’y avait qu’un seul coupable possible : Giusto Mor, l’ancien Premier Ministre de l’Empire.
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