Chapitre 13
Elodie
Ça y est, janvier est passé, Léo a terminé ses partiels et j’ai fait mes vœux sur Parcoursup. Il y a visiblement une coalition entre Léo, Mme D. et l’assistante sociale pour que je m’occupe des demandes de bourse. Ma mère m’a dit qu’elle était d’accord pour tout, mais il y a des papiers à signer et je ne sais pas quand elle rentrera. J’ai tout rempli. J’ai mis mes coordonnées bancaires à moi. L’adresse postale de Mme D. Comme ça tout transitera par elle, puis par moi. Ce sera plus facile quand j’aurai quitté l’appartement. Même si je ne sais pas où on habitera avec Léo et que ça me fait peur. La veille de la date de rendu des dossiers, je signe les documents moi-même en imitant la signature de ma mère. Tant pis. Mme D. a fini par accepter pour l’adresse, je ne suis plus à un mensonge administratif près.
Un soir, je reparle à Léo d’un éventuel emménagement. Visiblement, il a décidé de prendre les choses en main.
- Dans deux mois, tu es majeure et tu quittes l’appartement pour venir avec moi. On est toujours d’accord là-dessus ?
J’acquiesce. Evidemment.
- Cool. J’ai hâte.
Il sourit.
- J’ai commencé à regarder pour un appartement pour nous deux. Avec l’assistante sociale, on a vu comment je pouvais faire sans garant. A priori il y a des solutions. Mais si je le prends tout seul, ton nom ne sera pas sur le bail, et tu ne pourras pas toucher d’aide au logement. Je vais voir comment on peut faire. Peut-être qu’il faudrait que tu en parles à ta mère. Elle pourrait t’aider.
- Non.
- Et aussi, là, je crois que tu as rapporté toutes mes affaires. Il est temps de vider les tiennes. Si ton départ est un peu brutal, comme le mien, tu auras déjà un maximum de trucs ici en sécurité. Moins il restera de choses dans ta chambre, plus ça sera facile de les récupérer après coup.
- D’accord. Je vais tout déménager par petits bouts.
De toute façon, je suis de plus en plus chez lui et de moins en moins à l’appartement. Je n’ai plus envie de faire semblant. Je découvre la vie à deux et le sexe avec Léo, je ne parviens plus à accepter de me sentir limitée dans notre vie d’avant.
Malheureusement, ce n’est pas passé inaperçu. Guy est venu m’attendre à la sortie du lycée. Il a croisé Léo qui revenait de la fac. Ça a dégénéré. Quelqu’un est venu me chercher parce qu’il avait reconnu mon copain. Je me suis précipitée dehors. Chacun des deux avait empoigné l’autre par le col, et la proviseure essayait de les calmer. Les gens disaient que la police était en chemin. Je me suis précipitée au milieu, devant Léo, face à Guy.
Dès qu’il m’a vue, il a lâché Léo et m’a giflée tellement fort que je suis tombée par terre, mes lunettes à côté de moi. Il hurlait que j’étais une pute, que je couchais avec Léo, que c’était un raté. Je me suis relevée en quatrième vitesse en ramassant mes lunettes, prête à lui faire face, rouge de colère, mais Léo m’a poussée derrière lui. Cette fois-ci, c’était lui qui faisait paravent. Il a à moitié réussi à esquiver un coup de poing, mais s’est pris le second dans la joue au moment où la police arrivait. Ils s’y sont mis à deux pour restreindre Guy et l’ont emmené. La proviseure nous a regardés avec des yeux ébahis. Elle venait d’avoir un aperçu de ce qu’on avait vécu pendant des mois. Elle nous a fait entrer dans son bureau, et c’est l’infirmière qui a désinfecté et soigné la blessure de Léo. Ça m’a laissé une impression étrange ; comme si quelque chose avait basculé, comme si c’était la fin d’une époque. Et je me suis décidée.
- Madame, je suis majeure dans trois semaines. C’est hors de question que je retourne vivre avec ce type. Je vous préviens. Je reste ici.
Elle m’a dit qu’elle comprenait, mais qu’il fallait faire les choses avec prudence. Aller au commissariat déposer une main courante pour qu’il y ait des traces de notre agression. Discuter avec ma mère pour que les choses soient claires avec elle. Et trouver un vrai logement en dehors du lycée.

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