Pris d'un excès de colère plus que soudain, Chocolait se mit à prendre une petite pierre se trouvant non loin pour la jeter le plus loin possible... Ce qui fit rire Fromage-Blanc, par ailleurs.
- Moi je trouve que tu lui ressemble beaucoup, à cet imbécile...
... Chocolait resta silencieux un bon moment après cette phrase. Et puis quoi encore ?! Lui ressembler ? Hors de question ! Il n'était pas comme ça, lui !... Enfin. Juste un peu... Bon, il était peut-être tout aussi impulsif au fond. Et quelque part, c'était peut-être ce qui l'énervait tellement chez l’ainé. Il n'avait pas envie de lui ressembler ! Il ne voulait pas hériter de ce sale caractère ! Et pourtant, il l'avait parfois, lorsque ses émotions négatives étaient plus fortes. Sous ses grands sourires, il avait cette même colère, cette même amertume, ce qui le perdait bien souvent dans ses réflexions contradictoires… Et il partageait un peu les mêmes goûts, aussi... Beaucoup trop, même !
-... Tu sais. J'ai beau avoir du chocolat en moi, au fond... J'ai un peu de lait aussi, comme ta famille, Fromage-Blanc ! Je me demande si les choses se seraient mieux passées si j'étais resté avec vous, au final. Enfin, même quand j'étais petit, tu aidais beaucoup Choconoir pour mon éducation... Quand j'étais triste, il râlait car il était perdu… Mais toi tu souriais, tu faisais en sorte de me faire rire. Comme si j'avais deux frères, et toi tu étais le gentil !
- ... Je suis très touché de t'entendre dire ça, vraiment. Dit Fromage-Blanc en regardant le ciel. Après, tu sais, si tu étais avec nous... Bien-sûr, ça serait différent. Mais pas moins chaotique... Qui sait, peut-être qu'actuellement tu te serais senti mal à cause de notre famille si nombreuse, et que tu ne saurais pas vraiment trouver ta place... Peut-être que tu aurais voulu un peu plus de calme... Peut-être que tu aurais envie de partir régulièrement, cherchant à faire ce que tu veux, comme tu veux, avec qui tu veux ! Sans la moindre contrainte...
- Tu crois ? demanda Chocolait, surpris.
- Encore une fois... Qui sait. répondit Fromage-Blanc, soupirant. Après oui, en point positif... Il y aurait le fait que tu habiterais avec Glace...
Fromage-Blanc se mit à rire tout doucement, tandis que Chocolait se mit à rougir. Mince... Ses sentiments pour elle se voyaient tant que ça ?! Le brun joua légèrement avec sa tresse, gêné certes, mais au moins sa colère était partie. Il y avait du progrès !
-... J'ai une idée, commença-t-il, plus souriant. On a qu'à échanger ! Je vais chez toi comme ça je reste avec Glace, et toi tu vas chez moi et tu pourras voir Choconoir tous les jours !
... Ah. Cette fois c'est Fromage-Blanc qui se mit à rougir... Et Chocolait qui se mit même à rire ! C'était agréable, de discuter de choses sérieuses mais sans être trop solennel. Parler comme deux personnes proches ont l'habitude de faire ! Fromage-Blanc avait un peu cette aura qui donnait envie de se confier…
- Enfin... Pour revenir à ce que tu disais, reprit Chocolait... Tu as raison. On ne peut pas savoir. Peut-être que j'aurais été plus calme, mais peut-être que j'aurais été moins souriant par exemple. Peut-être que je me serais plaint de vous et aurait admiré Choconoir !... C'est vrai, après tout, y'a de quoi. Il a tous les défauts du monde, bien entendu ! Mais bon. Au fond, les personnes franches comme lui c’est bien, car on sait où on en est. Et puis il a toujours plein d'idées, pour faire des farces certes, mais pas que ! Et puis j’aime bien l’écouter parler de ses passions, et il est si bon musicien d’ailleurs…
Chocolait s'arrêta de parler après avoir énuméré les qualités de son frère... Ah. Bon sang. Il ne pouvait s'en empêcher !... Cette contradiction, de lui en vouloir pour rien, mais de beaucoup l'aimer... C'était un peu comme ça depuis toujours, quand il y pensait avec le recul ! C'était juste que maintenant qu'il essayait de s'affirmer, d'être plus franc, s'inspirant de son modèle... Cela peut déraper. Et face à cela, une seule solution. C'est pour cela que Chocolait se leva, déterminé.
- Tu sais quoi ? J'y retourne, affirma fièrement Chocolait. Je vais aller lui parler. J'ai pas arrêté de douter pendant des jours et des jours, et je me rend compte que fuir comme je viens de faire, c'est pas la solution. Je dois le voir ! Si après avoir été honnête sur ce que je ressens, on se dispute ou pas mais au moins on sera fixés !
- C'est une très bonne idée... acquiesça Fromage-Blanc. Cela dit, tu n'es pas obligé de le faire maintenant... Tu peux attendre d'être prêt...
- T'en fais pas, répondit Chocolait en secouant la tête. Je… Définitivement, je le suis ! Je suis prêt ! Je n'arrête pas de me tourner vers l'avenir ces derniers temps, sans penser à l'instant présent... Et donc je vais le faire. Là, maintenant, je me sens prêt à lui parler. Ce serait bête si j'attendais et laissais encore filer l'occasion !
- ... Si tu le dis.
Décidément, il était vraiment comme son frère. Tout aussi imprévisible.. Mais cela faisait leur charme, en un sens. C'est ce que se disait Fromage-Blanc, tandis qu'il se leva.
- Je viendrai une autre fois, alors, conclue-t-il. Je vais vous laisser entre frères...
- D'accord. Je... Merci de m'avoir rassuré, Fromage-Blanc. Ça m'a fait plaisir de parler un peu avec toi. Grand frère ou pas... Je t'adore !
Le plus jeune se mit à serrer Fromage-Blanc dans ses bras, comme pour le remercier. Ce dernier, en retour, lui tapota doucement la tête avec un sourire, répondant simplement un « C'est normal »...
Puis, souriant l'un comme l'autre, ils se dirent au revoir avant de prendre chacun leur chemin !
Et le voilà. A nouveau. Devant cette petite maison qui lui faisait perdre son sourire tous les soirs. Cette fois-ci ne faisait pas exception, d’autant plus qu’il y avait du stress ajouté à tout cela ! Il s'était disputé avec l'aîné tout à l’heure, après tout ! Et... Et c'était totalement de sa faute. Pas celle de son frère. C'était totalement à lui de s'excuser. De se confier, de mettre les choses à plat... Il prit une grande inspiration avant d'ouvrir la porte, tout en étant le plus discret possible... Heureusement pour le cadet, Choconoir semblait trop concentré pour prêter attention à la porte qui s’était ouverte. Il était en train de jouer du piano, très sûrement pour essayer de se calmer, comme à son habitude... Parfait, c'était ce que Chocolait voulait ! Toujours avec prudence, il s'empressa de monter dans sa chambre, récupérer quelque chose, et revenir.
... Parfait, Choconoir était encore trop concentré pour l'avoir vu. C'était le moment… Un moment tant attendu par Chocolait et pourtant, ses mains étaient tremblantes, serrant contre lui ce qu’il venait de récupérer. Une création qui lui tenait à cœur.
... Il pouvait le faire. Il devait sauter sur l'occasion lorsqu’elle se présentait ! Armé de tout son courage, poussant un dernier soupir pour se rassurer et extirper les dernières tensions, il se plaça correctement et... Ding. Un autre son mélodieux sortit de cette pièce, mais pas du piano de Choconoir, non. Ce dernier s'était d'ailleurs arrêté sur le coup, cherchant la source de ce bruit... Evidemment, cela venait de la création de Chocolait : un bel instrument de musique marron, que nous appellerions chez nous une « guitare ». Les fines cordes chocolatées que le cadet touchait avec habileté permettaient de produire un son élégant... Puis un autre... Puis un autre encore ! Une courte phrase mélodieuse… Et Chocolait continua ainsi, comme pour communiquer avec son frère par un moyen différent des mots, et peut-être plus pur, plus direct. Entre deux amateurs de musique, c’était tout à fait possible... L'aîné pianiste l'accompagna dans la discussion, cette mélodie improvisée. Très vite, ils avaient réussi à s’accorder l'un avec l'autre, sans prendre le besoin de se concerter ou même se regarder. C’étaient simplement leurs ressentis qui étaient formulés !
Pourtant, quelques simples notes de piano firent arrêter Chocolait. Ces sons-là... Il les connaissait. Très bien, même. C'était la berceuse que son frère lui avait chanté il y a longtemps. Quand il était tout petit et qu’il avait fugué... C'était exactement cette musique qui avait permis de se calmer et d'arrêter de pleurer.
Mais maintenant qu’il était grand et intériorisait toute sa négativité, les choses étaient si différentes et si compliquées… Les quelques notes procurèrent l’effet inverse. Certes, cela restait agréable parce que d’une manière cela calmait tant de tensions et de doutes, mais cela se manifesta par la forme de larmes chocolatées glissant sur ses joues. se contenta de renifler de temps en temps afin de ne pas éclater en sanglots et pouvoir écouter cette douce mélodie jusqu'au bout, qu’il aimait tant... Quand cette dernière se finit, Chocolait relâcha toute la pression restante. Son aîné le regardait silencieusement, avec le plus grand des calmes. Lorsque ce dernier n’était pas en colère, il savait se montrer mature, et savait qu’il était judicieux d’attendre plutôt que de sermonner son cadet… Cela prit un petit moment, mais Chocolait prononça quelques mots :
- ... J'ai été stupide, commença-t-il.
- Pour être franc, oui, répondit son grand-frère rancunier.
- Je... Je suis tellement désolé ! Je sais que ça n'excuse pas tout ce j'ai dit, je... Je sais pas. Je regrette. Au fond, je le pense pas vraiment ! Enfin... J’en sais rien. Je sais pas ce que je veux. Peut-être que... Que je voulais me disputer pour avoir une raison de partir et de t'en vouloir, car au fond je n'ai aucune justification valable ? Car au fond je veux pas ? Car je sais que c'est stupide de t'en vouloir pour des trucs passés, alors que tu essaye de devenir une meilleure personne ? Et que je t’aime assez pour vouloir te pardonner, mais une partie de moi trouve ça injuste ?... J'en sais rien. Je sais pas... Dans tous les cas, c'était stupide de faire comme ça. Pardon grand-frère.
Choconoir écoutait attentivement son interlocuteur, s'étant tourné vers ce dernier. Prenant le soin de ne pas lui couper la parole, il attendait la fin avant de répondre, soupirant pour se calmer un peu lui aussi. Au fond, il était un peu ému, bien qu’il était beaucoup moins expressif que son cadet là-dessus.
- C'est pas grave. Maintenant que tu m'as expliqué clairement, je comprends mieux. Tu imagines bien que je peux pas répondre à tes doutes pour toi, mais si en parler de temps en temps permet de t’aider plutôt que de tout garder et aggraver comme ça… Je suis là tu sais ? Surtout si ça me concerne, quoi. Ça nous arrive tous de s'emporter donc je peux pas te faire la morale. Mais pour ce que moi j’ai fait, je suis désolé aussi... Sincèrement. Pour mes erreurs passées, et aussi pour tout à l'heure, répondit-il en pointant la joue.
- C'est pas grave, je comprends ta colère ! exclama Chocolait en riant un peu.
- ... C'est quoi en fait, ce que tu tiens ?
Ah. Son instrument de musique, à lui. Sa « guitare ». C'est vrai que c'est la première fois qu'il la montrait à son frère ! Ca fait un moment qu'il voulait lui en parler, mais avec ses réflexions existentielles, il avait tellement hésité… Maintenant était le moment.
- C'est un instrument de musique, commença-t-il. Je me suis un peu inspiré du système de ton piano pour les cordes, je t'avoue ! Mais le son est très différent comme as pu l’entendre.
Chocolait avait un nouveau un grand sourire sur son visage, bien qu’il avait frotté ses yeux entre deux phrases.
- Je... J'aime tellement t'écouter jouer !... Je t'avoue avoir été un peu jaloux, au début... Mais je me disais « pourquoi pas essayer, moi aussi » ! Et puis...
Le jeune homme prit une inspiration avant de continuer à parler. C’était le moment. Une fois de plus, il se répétait ses simples mots avant de s’exprimer :
- Quand j'ai commencé à jouer de mon propre instrument, j'ai tellement aimé !... J'ai envie de partager cette passion à plein d'autres personnes. C'est pour ça que... Que j'aimerais faire apprendre la musique à tous ceux qui voudraient !... Du coup, j'avais un peu peur de ta réaction, toi qui est bien plus fort que moi dans ce domaine et que tu as fait ça tout seul. Peut-être que tu préférerais que ça soit exclusif ? Ou bien le projet t'intéresserait au contraire...? Je sais pas.
- Eh bien pour t’avouer quelque chose... commença Choconoir, ce n’était pas vraiment « tout seul » que j’ai créé un piano. On m’avait donné quelques conseils, donc ce serait trahir cette personne de vouloir garder ça pour moi, je pense…
Choconoir regarda le vide quelques instants, un sourire presque enfantin décorant son visage, ce qui était très rare venant de ce jeune homme. Il s’était perdu durant des petites secondes en replongeant dans ce souvenir, jouant même du bout de ses doigts comme s’il continuait à faire du piano... Mais il se reprit bien vite, croisant les bras.
- Enfin, cette histoire n’est pas très importante, je préfère me concentrer sur ton projet, continua-t-il. C'était agréable de jouer un peu comme ça avec toi, je t'avoue... Essaye, tant que tu es motivé. Je verrai si je te rejoins, mais... Dans tous les cas je ne t'en veux pas pour partager cette même passion que moi. Au contraire ! On aura un sujet de conversation en plus sans se disputer... Enfin, j'espère.
Les derniers propos de Choconoir étaient évidemment prononcés sur le ton de la blague, alors il se mit à rire légèrement après ces mots... Et Chocolait aussi ! Il se frotta les yeux une dernière fois et s'approcha de son fraternel, le serrant dans ses bras, murmurant un « Merci beaucoup… Grand-frère ! »
De douces émotions, des conflits réglés, une belle relation entre frères... Rien à redire, tout semblait si parfait... L'histoire aurait bien fini comme ça, si quelqu'un n’avait pas toqué à leur porte… C’était très étrange ! Pourtant Fromage-Blanc ne pensait pas venir au final. Qui donc…?
- C'est ouvert, dit Chocolait, un peu surpris.
La porte s'ouvrit donc, laissant place à une petite fille. Elle leur ressemblait un peu ! Les traits du visage, l'odeur... Mais ses couleurs étaient très différentes. La peau très pâle, les cheveux blancs... En tout cas, ils étaient sûrs de ne jamais l’avoir vu.
- Bah alors, commença-t-elle. On ouvre pas la porte à une belle princesse comme moi ? Frères indignes. Vous avez intérêt à être meilleurs pour votre petite soeur !
- ...Pe... petite soeur ?!
Quel est votre recette au chocolat préférée ? Pour ma part, je vous avais parlé la dernière fois du fait de mélanger les chocolats... Mais si je devais choisir une seule recette au chocolat noir uniquement, ce serait les fondants ! Les desserts chauds sont sûrement ce que je préfère... Avec une boule de glace et pourquoi pas du caramel, c'est parfait !
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