Comme à ce moment-là, où il se cachait dans les petits buissons en riz cantonnais. Café ne pouvait pas le voir ! Mais il était près… Près… Si près… Trop près ! Sel eut le réflexe de reculer, sans avoir fait attention que le chemin derrière lui était en pente. Le pauvre garçon tomba, roula, se cogna, … Ces bruits interloquèrent Café, qui regarda rapidement et nerveusement de tous les côtés !... Mais il ne trouva rien. Il fallait croire qu’il cherchait vraiment sans réelle conviction ou patience… Une fois la voie libre, Bretzel courut voir son ami : heureusement, le petit garçon n’avait rien de bien grave, il avait atterri sur un coin de fleurs. Il releva la tête pour voir dans quel genre d’endroit ils étaient retrouvés, plissant les yeux et… Oh ! Ils ne connaissaient pas cet endroit mais ce qui était sûr, c’est qu’ils n’étaient pas déçus de ce hasard. C’était vraiment beau… Des fleurs et plantes fruitées et crémeuses aux couleurs vives contrastaient avec les arbres marrons de cannelle, eux-mêmes décorés par de belles feuilles vertes et rouges foncées pimentées. L’odeur y était très agréable... C’était vraiment un endroit plaisant sur lequel ils étaient tombés ! Et puis, ça semblait désert…
“On n’a qu’à rester ici un moment ! Comme ça, on nous trouvera pas ! Dit Sel, un sourire naïf aux lèvres.”
Bretzel sautilla pour répondre, semblant compatir à ce qu’avait dit son ami. Là au moins, personne ne les embêterait ! Et ils pourraient jouer tranquille jusqu’à ce que Café déciderait d’abandonner !
Malheureusement, lorsque certains adultes ont une idée en tête qui leur apporte quelque chose, un fait matériel ou une simple satisfaction d’égo, même s’il fallait briser les rêves d’un enfant, ils n’abandonnent pas. Il ne fallut que quelques temps pour que Café retrouve les deux amis. Sel avait beau être discret, il fallait croire que cela ne servait à rien… Les voilà dans une nouvelle course poursuite où le petit Bretzel courrait très vite, si bien que Sel avait du mal à maintenir la même vitesse. Cela les faisait même ralentir… Tous les deux… Café n’eut aucun mal à les rattraper tous les deux… Enfin, il rattrapa Bretzel, il n’en avait pas grand-chose à faire de Sel après tout...
- Lâchez-le! Ordonna Sel, d’un air décidé.
Bien entendu, Café n’avait pas peur d’un petit gamin qui se dressait contre lui -il en avait presque l’habitude. Il se mit à la hauteur du petit garçon et afficha un sourire se voulant amical.
“ Ne t’en fais pas petit, commença-t-il. Nous n’allons pas faire de mal à ta petite… Euh, chose… Vu que tu n’as pas l’air de vouloir coopérer, nous allons le prendre et l’analyser. Mais il restera indemne.
- J’en crois pas un mot ! Je ferai tout ce que vous voulez et vous le laissez tranquille !
- Très bien, répondit Café, avec un sourire tendu. J’ai donc quelques questions à te poser… Comment t’y es tu pris pour le créer ? Quelles ont été tes méthodes? Tes techniques ?
Sel semblait gêné : il ne pouvait pas vraiment répondre à la question… Des méthodes ? Comment il s’y était prit ? Il ne le savait pas. Jusque-là, il faisait toujours ce qu‘il dessinait, tout simplement ! Sans réfléchir à des techniques très précises ou autre chose… N’était-ce pas l’imagination et la volonté, les clés pour créer?
- Euh… Euh… Je l’ai créé avec mon cœur ! Tout simplement ! J’ai juste voulu trouver une solution pour qu’on soit jamais seul… Et c’est tout! Répondit Sel, naïvement.
… Café regardait le pauvre Sel d’un air dépité. C’était vraiment un gamin qu’il avait en face de lui ! Ne pas réfléchir aux méthodes et aux techniques pour pouvoir créer quelque chose… « Stupide » était le premier mot qui lui venait à l’esprit.
- Eh bien, soupira-t-il. C’est bien mignon, ces petites phrases sorties toutes droites d’un conte, mais ça ne me suffit pas.
Puis il commença à partir, sans donner plus d’explications. Bien sûr, le petit Sel essaya de tout faire pour reprendre son compagnon… Café, lui, n’en avait rien à faire des demandes ou des petites attaques enfantines. Ce n’était pas la première fois, et puis il était plus agacé qu’autre chose. Arrêtons cette nuisance, donnons-lui un coup violent… Sur la tête, son point faible. Bien sûr, il reçut très mal le coup. Si mal qu’il ne put faire quoi que ce soit ensuite... C’était comme si on l’avait paralysé.
“N-ne t’en fais pas Bretzel! Je…Je viendrais te chercher !”
Tandis que la silhouette de Café disparaissait petit à petit, Sel le promettait de tout son cœur... Dès qu’il serait en mesure de faire quoi que ce soit, il sauverait son ami…
Le temps passa bien lentement, Sel dut attendre longtemps pour se rétablir. Sa tête lui faisait mal facilement, mais là c’était vraiment horrible… Difficilement -car même rétabli, il avait encore du mal-, il se leva et partit enfin à la recherche de son ami. A vrai dire, il ne savait pas du tout où Café se trouvait. Pendant plusieurs jours, il demandait à son entourage, encore et encore… Cependant, personne ne le savait vraiment. Il fallait croire que cet homme était tellement désagréable qu’il avait très peu de proches. Même en cherchant de lui-même, Sel ne trouvait pas. Il vivait éloigné de la population ou bien !? En tout cas, il était vraiment inquiet pour Bretzel. Que pouvait-il lui faire? Comment se sentait-il? Est-ce qu'au moins si Sel avait couru plus vite, Bretzel s’en serait sorti sans problèmes?… Ah, cette dernière pensée était plus douloureuse. Il se sentait coupable… C’était donc de sa faute si le petit Bretzel était maintenant en danger?…
« Allez ! Se dit cependant Sel à lui-même, je vais le retrouver ! Ce… Ce n’est pas le moment de penser à ça !... Mais…»
Mais pour le pauvre petit Sel, c’est bien difficile de se consoler tout seul…Des petites larmes ne se cachèrent pas et coulèrent, tout doucement. Il ruminait, se répétant des pensées négatives telles que :
« C’est de ma faute! J’aurais dû lui dire de partir devant!... Je veux le revoir! Je veux rejouer avec lui! ».
- Allons, sèches tes larmes! C’est triste de voir les gens tristes !
Au moment où Sel releva légèrement la tête, il remarqua une main… Quelqu’un lui tendait un petit mouchoir en tissu. Après un petit hoquetement, Sel le prit et essuya ses grands yeux. Le mouchoir avait une drôle d’odeur, il avait un peu du mal à la supporter au début… Mais ça allait ! Et puis c’était déjà gentil que quelqu’un vienne pour lui, n’est-ce pas ?
- Merci… Dit-il, dans un reniflement.
- C’est normal! Tu sais quoi? On m’a toujours dit que lorsqu’on est triste, cela ne dure jamais éternellement ! Alors, il ne faut pas rester triste trop longtemps, ou l’on pourrait ne pas remarquer plein de choses heureuses !
« Quelle drôle façon de voir les choses ! » se dit Sel, perplexe… Mais quand on y pensait, ça ne semblait pas totalement faux… Oui ! C’était vrai, même ! S’il arrêtait de se lamenter… Il retrouverait son ami plus vite et pourrait s’amuser avec lui plus longtemps !
« Allez, Sel… Ressaisis-toi ! »
Il se tapota les joues avant de se relever, prêt à remercier son interlocuteur mais… Tiens. Il semblait déjà parti… Qui ça pouvait bien être?… Bah, peu importe ! Ce qu’il savait, c’était qu’il lui serait redevable. S’il le reconnaissait, il lui dirait un grand merci ! C’était ce qu’il pensait, tout en regardant le petit mouchoir qu’on lui avait donné : il était tout blanc, avec quelques bordures rosées. Au vu du mouchoir et de la voix tout à l’heure, le créateur était surement un enfant aussi. Un petit enfant naïf, pur et innocent…
Peu de temps plus tard, un grand homme s’approcha de Sel... Il s’agissait de Vinaigre.
- Sel ! Tu vas bien? J’ai cru t’entendre pleurer.
Le petit garçon savait qu’il avait une voix cassée et facilement reconnaissable, mais pas au point qu’on le remarque au loin…!
- C-ce n’est rien, je vais mieux maintenant… Répondit Sel, reniflant encore un peu.
- Ravi de l’entendre… Mais dis-moi, où est ton petit compagnon ?
Sel ne répondit pas, se contentant de baisser la tête. Vinaigre, par ce simple geste, comprit rapidement ce qui se passait. D’une vive colère digne de lui, il pensa tout haut :
- Saleté de Café... Il ne perd rien pour attendre ! Je vais aller le voir, il va m’entendre !”
A ces mots, le petit garçon releva automatiquement la tête, une lueur d’espoir luisant dans ses yeux mouillés.
- Vous savez où il se trouve, Monsieur?…
- Moi ? Oui bien sûr.
- ...Emmenez-moi avec vous ! Je veux sauver Bretzel ! S’il vous plaît !... S’il vous plaît…
Voilà que les petites larmes firent à nouveau leur apparition... Par réflexe, il utilisa le mouchoir qu’on lui avait offert.
- … C’est d’accord, répondit simplement Vinaigre.
Il prit la main du jeune enfant et commença à l’emmener dans la direction qu’il a tant cherchée, la direction qui le mènerait à cet homme affreux, mais aussi la direction qui le mènerait à son ami…
Comme Sel le pensait, Café vivait assez éloigné du reste des autres ; ils mirent pas mal de temps à arriver. Pourquoi avait- il emménagé si loin? Peut-être n’aimait-il pas vivre en groupe ? Allez savoir... « Quel étrange bonhomme ! » pensa tout de même Sel.
- Voilà ce qu’on va faire, annonça Vinaigre. Toi, tu vas te cacher pendant que je vais parler à Café. J'attirerais son attention et fera un signe à ton petit compagnon pour qu’il te rejoigne et vous partirez discrètement. Ça te convient?
- O-oui! Répondit le petit Sel, se remémorant les phrases plusieurs fois afin d’être sûr d’avoir bien compris.
Vinaigre sourit légèrement à Sel et commença à entrer dans la demeure… Comme on pouvait s’y attendre, il y avait Café qui examinait la petite créature.
- Bonjour, commença Vinaigre, interrompant les activités de l'autre homme.
- Hein ? Qui est là ?!... Oh, Vinaigre… Bonjour. Pardon mais… Ne vois-tu pas que je suis occupé ?
Et en effet, Café semblait... Occupé à torturer ce pauvre petit Bretzel ! Il était là, entouré de dizaines de croquis, à tatonner la petite bestiole, lui faire passer des tests improbables pour vérifier sa vitesse, son comportement… Bref, ce genre d’analyses idiotes pour soit disant comprendre les moindres détails… La petite bête semblait essoufflée. Néanmoins, elle semblait rassurée en regardant Vinaigre et son sourire au coin.
- Oh, excuses-moi, je n’avais pas fait attention. Je voulais juste quelques informations à propos du concours.
- Je vois… Que veux-tu savoir exactement ?
- Et bien…
Puis Vinaigre entreprit un long, long discours inutile, posant des questions dont il avait toutes les réponses… Il gardait cependant son sourire, comme pour donner signe à Bretzel de s’enfuir… Ce qu’il fit, le plus discrètement possible. Malheureusement, le discours de l'homme tourna vite en rond.
- Arrêtes de m’ennuyer veux-tu?! Je suis occupé avec cette chose et… Mais où est-il !?… Ah, il s’enfuit!
- Oh. Dommage... dit simplement Vinaigre pour conclure la situation.
Pris de peur suite au cri de Café, le pauvre Bretzel partit en courant !
- Rattrape- le, non ?! Hurla Café.
- Pas envie, répondit Vinaigre avec son habituel visage grognon, partant.
… Café était comme indigné. Il se prenait pour qui, pour répondre ainsi à sa personne !? On n’est jamais mieux servi que par soi même de toute façon ! Il alla donc lui-même à la poursuite de la petite bestiole. Vinaigre essayait tant bien que mal de le ralentir, mais l’adulte semblait déterminé... Une fois sorti, Bretzel aperçut Sel et lui sauta dans les bras. Quel bonheur ! Quelle joie de …. Oh. Ils n’eurent même pas le temps de commencer à fuir ou même de sourire que Café était déjà là… Vite. Il faut partir. Sel courut, courut à toute hâte ! Pas le temps de savourer les retrouvailles, il n’avait qu’une idée en tête : fuir.
Malheureusement, le petit garçon était une fois de plus trop lent et Café réussit à le rattraper. Saisissant violemment son bras, Sel fit tomber son compagnon… Mais ça lui laissait une chance de s’échapper, et c’était hors de question pour l’adulte ! Voulant le retenir, il posa violemment son pied sur une des pattes de Bretzel pour l’empêcher de bouger ! Le pauvre petit renard laissa échapper un cri, sur le coup de la douleur… Il s’arma néanmoins de son courage et mordit la jambe du grand homme pour la lui faire bouger et lui permettre de s’extirper. Heureusement, il a réussi. Malheureusement, il avait mal. Si mal… Sel écarquilla les yeux, sur le coup. C’était encore à cause de sa lenteur qu’ils s’étaient fait avoir ? C’est de sa faute si maintenant le petit Bretzel avait mal à sa patte... ? Bretzel regarda tout de même son ami, inquiet.
- Ne t’en fais pas, moi ils ne me feront rien... Pars te réfugier ! Vite ! Promis, je... Je te retrouverai !
Le petit renard semblait bien triste, mais il n’avait pas le temps pour hésiter… Il exécuta les ordres qu’ils lui avaient été donnés. Malgré la blessure de sa patte, il trouva vite un endroit où se cacher, prenant la direction de la forêt qu’ils avaient découvert il n’y a pas si longtemps… Café lâcha le jeune garçon qui se frottait à présent le bras. L’adulte n’y était pas allé de main morte, il avait plutôt mal... Cependant, il se retint du mieux qu’il pouvait pour ne pas pleurer. Après ce qui lui était arrivé, pleurer pour une simple blessure serait stupide !
- Tu te rends compte de ce que tu as fait!? Commença Vinaigre, indigné. Tu as blessé un enfant !
- Je n’en ai rien à faire. Tout le monde finit blessé un jour ou l’autre ! Et il ne me sert plus à rien de toute façon.
- … Tu es sérieux ? Je n’arrive pas à y croire… ! Où est ton sens moral ?!
Malgré la colère qui se ressentait chez ces deux-là, Vinaigre et Café entamèrent une discussion des plus sérieuses que Sel, assez jeune et bouleversé par les évènements, ne comprenait pas très bien. Il préféra les laisser tranquille et partir voir Bretzel, affichant un sourire discret à Vinaigre pour le remercier.
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