À peine sortis de la ville, à une centaine de mètres seulement, le groupe arrive aux premiers abords de la forêt. Des arbres imposants au feuillage dense, semblable à celui du Ginkgo biloba, en plus grand, les accueillent. Ils avancent petit à petit dans la forêt qui se fait plus épaisse et imposante. Sa végétation est telle une cage naturelle qui coupe toutes communications avec le monde extérieur. L’humidité augmente au fur et à mesure qu’ils s’engouffrent vers la montagne. Plus ils évoluent et plus une moiteur oppressante embrasse la peau des excursionnistes. L’odeur de la verdure et de la terre humide, transportée par les faibles brises parcourant la forêt, arrive à peine à rafraîchir le groupe en mouvement. Ils ont pour objectif d’aller jusqu’à la montagne puis de revenir, un peu comme une ligne droite. La plus droite possible en suivant les chemins sinueux qui les plongent dans un paysage de plus en plus feuillus et sombre.
Est-ce que tout le monde m'entend ? demande monsieur Sgoil en se retournant vers le groupe dont il a pris la tête pour le guider.
Oui ! répond en chœur le groupe encore assez sage.
Formidable ! Nous allons emprunter des chemins de plus en plus étroits. Bien que cette excursion soit faite chaque année, nous ne sommes jamais sûrs de rien. Je demande donc aux accompagnateurs de ne pas quitter des yeux votre protégé(e). Si toutefois vous vous retrouvez seuls ou perdus, utilisez votre sifflet.
D’accord ! répondent les excursionnistes.
Ils continuent donc de s’engouffrer sur les chemins ambiguës où les herbes basses urticantes commencent à attaquer les malheureux dont les vêtements ne couvrent pas les chevilles.
Amina, la meilleure amie de Chlotilde et son petit mouton, fait partie de ces malchanceux. Du haut de son mètre tout rond, elle veut faire plaisir à sa chère amie. Pour correspondre à ses exigences, elle à choisi de porter une robe de princesse avec des souliers ouverts et des chaussettes basses pour cet événement. Cependant, elle se rend vite compte que ce n’est pas là l’idée la plus ingénieuse qu’elle ait eu. Les démangeaisons s'attaquent à ses chevilles dénudées ; elle se retient déjà depuis quelques minutes mais les irritations se font de plus en plus visibles et douloureuses. Une larme perle sur son visage crispé à la peau de porcelaine. Ne pouvant plus se retenir, elle porte le sifflet à sa bouche et siffle.
Tout le groupe se halte sur un sentier entouré de fougères plus ou moins hautes qui cachent les fameuses plantes urticantes.
Que se passe-t-il ? s’enquiert immédiatement l’organisateur de cette sortie.
Je veux rentrer, blêmit Amina les larmes ruisselant le long de ses joues. J’en ai marre de cette forêt horrible qui n’en finit pas. C’est nul. Ça pique de partout, je n’arrive même pas à respirer tellement l’air est lourd.
Nous n’allons pas faire demi-tour alors que nous sommes pratiquement arrivés, dit monsieur Sgoil passablement agacé.
Mais je -
Un bruit lourd se fait entendre par tout le monde. Les enfants, pour certains fatigués, cèdent à la panique. Le groupe se disperse alors. Dans cette confusion, Chlotilde emprunte un sourire satisfait. Le regard fourbe et noirci par la haine qui l’anime, elle semble avoir imaginé un plan parfait. En plein brouhaha, un élève court vers Yu et Léo. Cet enfant dans un rythme effréné de terreur heurte le duo fraternel et les sépare avant de tomber sur le sol froid et légèrement boueux.
La cousine à l’apparence sophistiquée ne peut manquer une telle opportunité. Elle se dirige vers Yu oubliant les herbes qui lui griffent les mollets. L’enfant aux yeux verts nuancés de doré, encore déboussolée, tente de retrouver un certain équilibre pour rester debout. C’est sans compter sur l’aide de Chlotilde, qui dans un souffle d’effort aussitôt couvert par la lourdeur de l’atmosphère, la pousse violemment dans les fougères.
Léo reprend ses esprits. Et dans la confusion ne se rend pas compte que sa sœur manque désormais à l’appel. Il prend alors le temps d’aider le pauvre élève affolé, tombé au sol. C’est quand il se relève qu’il prend conscience de la disparition de Yu.
Yu ! Où es-tu ? s’inquiète le grand-frère en chemise ample.
Je crois l’avoir vu aller par-là, annonce Chlotilde en pointant une direction au hasard.
Tu es bien sûre de toi ? demande Léo, le regard méfiant.
Oui, oui. Je me suis tournée pour chercher papa. Mais à la place j’ai vu Yu se mettre à aller en dehors du sentier. Je me demande d’ailleurs pourquoi, raconte-t-elle en haussant les épaules, les paumes vers le plafond de feuilles.
Bon, je vais aller la chercher, informe monsieur Sgoil que je suis parti à sa recherche s’il te plaît, demande-t-il.
Chlotilde, si c’est encore un de tes sales coups, cette fois-ci je ne te pardonnerais pas, ne manque-t-il pas de lui dire juste avant de partir.
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