Il régnait une tension certaine dans cette ruelle. Ozan observait les trois hommes se jauger du regard, sans bouger d'un poil. La scène dura une bonne minute, avant que l'homme tatoué frappe le sol violement avec son pied. Son coup fit trembler l'entièreté de la rue, soulevant devant lui un amas de pierres qu'il frappa d'un coup circulaire de la main. Les rochers qu'il avait devant lui se brisèrent en des dizaines de petits projectiles fonçant droit en direction du cyborg et du combattant, ignorant Ozan. Est-ce que cet homme étrange ne considérait pas le sorcier comme une menace pour lui ? Alors qu'il l'avait rattrapé d 'une bourrasque !

•     - Tu t'enfuiras pas si facilement ! dit Ozan pour lui-même alors que l'homme tatoué partait.

Il se concentra de nouveau pour rassembler les vents autour de lui, mais son effort précédent avait épuisé son mana. Et puis sa tête avait beau avoir arrêté de tourner, il avait toujours l'impression qu'une ruche y avait élu domicile. Il eut d'ailleurs du mal à se concentrer à cause du vacarme produit par ses deux compères face aux projectiles rocheuse. Il les entendit commencer à courir pour rattraper leur agresseur, et une voix rauque (certainement celle du cyborg) retentit.

•     - T'es pas un malin toi hein… tu l'as fait fuir alors que je le tenais.
•     - T 'occupes papy boulon ! répondit le combattant va te remettre un peu d'huile tu commences à grincer. Pendant ce temps-là je vais m'occuper de lui.

Le cyborg expulsa un souffle de vapeur de son bras, mais Ozan supposa que c'était plus un soupir d'exaspération qu'un système de refroidissement… Après quelques secondes de forte concentration Ozan parvint à décoller plus délicatement que tout à l'heure, et à partir à son tour à la poursuite de l'homme tatoué.

Le groupe d’Ori rentrait tranquillement vers l'orphelinat lumière quand l'explosion retentit au loin.

•     - C'était quoi ça ? S'intrigua Ori.
•     - Je ne sais pas mais ça n'annonce rien de bon. Répondit Hana. Prends Zoé, on accélère le pas. Dit-elle à Ori à voix basse. Allez les enfants on se dépêche de rentrer pour manger !
•     - Eh je vais bientôt plus pouvoir faire ça moi, t'es plus forte que moi tu pourrais la prendre. Rétorqua Ori
•     - Discute pas ! On rentre en vitesse avant que ça dégénère…

Elle avait l'air vraiment inquiète. En même temps, réunir au même endroit les représentants des différentes nations du monde… l'ambiance risquait d'être tendue. Ori s'exécuta alors et prit Zoé dans ses bras avant d'accélérer le pas.

Après quelques minutes de marche effrénée en direction de l'orphelinat, le groupe d'enfants commençait à entendre des bruits de foule mécontente. Et au détour d'une ruelle, un homme tomba du ciel juste devant Ori, le bousculant à son arrivée. Ce dernier parvint malgré tout à protéger la petite Zoé en tombant mais atterrit sur le dos, et entendit un craquement inquiétant.

•     - Eh mais vous êtes pas bien ! Y'a des escaliers pour descendre des passerelles, dit-il péniblement.

Effectivement, l'homme qui avait atterri ici devait avoir sauté depuis la passerelle juste au-dessus d'eux tant les gens qui s'y trouvaient se penchaient pour voir ce qu'il en était. La ville étant constituée majoritairement de bâtiments très hauts, on y avait construit énormément de ponts et de passerelles entre les balcons de ces derniers. L'inconvénient, c'est qu'on y voyait souvent les jeunes escalader et sauter de balcon en balcon, quitte à risquer la chute. Et en l'occurrence, une telle chute aurait dû briser les jambes de cet homme. Mais il se releva sans problème devant Ori, s'époussetant le pantalon.

•     - Désolé petite, je suis pressé. Dit-il et une voix profonde.

C'était l'homme le plus étrange qu'Ori avait jamais vu. Il était recouvert de tatouages, représentant des runes similaires à celles des portails. Enfin similaire, Ori n'en était pas sûr mais cet homme l'intriguait énormément. Soudainement ce dernier releva la tête en direction de la passerelle, et se mit à courir.

•     - Monsieur attendez ! Ori se releva en vitesse et entreprit de le poursuivre.
•     - Où est-ce que tu vas ? Ori revient. S'exclama Hana qui récupérait Zoé dans ses bras.
•     - Rentrez sans moi, je vous rejoins ! répondit il
•     - Ça y est soupira-t-elle, grand 'ma va me tuer…

Ori avait clairement surestimé son état. Il se rendit vite compte en poursuivant cet homme que ce qui avait craqué lors de sa chute n'était pas une branche, mais certainement son dos. Il souffrait le martyre et avait du mal à rattraper l'homme tatoué, bien que ce dernier soit ralenti par la foule dans les rues. Mais il était bien trop intrigué par cet homme pour abandonner. Il avait senti en lui quelque chose d'inhabituel, et voulait en savoir plus. Et après avoir monté quelques marches et traversé un pont, l'homme s'arrêta devant un portail placé sur le côté, posa la main dessus, puis y entra.

Une fois au niveau du portail, Ori s'arrêta, hésitant… Il savait bien que le portail n'allait que dans un sens. Il avait toujours rêvé de partir en voyage, découvrir le monde, et pourquoi pas en apprendre plus sur sa famille, savoir pourquoi ils l'avaient abandonné, laissé seul… Mais il hésita, repensant à l'orphelinat, Grand'ma, la petite Zoé, et Hana avec qui il s'entendait si bien. Non, ça ne valait pas le coup de poursuivre un parfait inconnu juste parce qu'il l'avait intrigué, et puis s'il partait maintenant, Hana devrait subir la fureur de Grand'ma à sa place. Et bien que cette idée fasse rire Ori, il n'était pas assez machiavélique pour souhaiter ça à qui que ce soit Perdu dans ses pensées, Ori revint à la réalité en ressentant une forte chaleur soudaine. Le portail en face de lui s'était mis à luire beaucoup plus que d'ordinaire, dégageant une très forte chaleur. C'est alors qu'il entendit un petit groupe accourir dans sa direction Il était constitué d'un immense combattant Raï, un jeune garçon flottant au vent, un vieil homme au corps remplacé par du métal, et une Valkyrie courant quelques mètres derrière eux. Ils montaient les marches de l'escalier quatre à quatre (sauf le jeune sorcier évidemment) en pointant le portail du doigt. Ori se retourna alors de nouveau vers ce dernier, pour voir qu'il luisait encore plus, et que la chaleur qu'il dégageait devenait presque insoutenable. Les passants s'étaient tous écartés excepté Ori. Il comprit très vite ce qui allait se passer, et ça ne serait pas beau à voir. Il s'avança donc en direction du groupe de poursuivants et s'interposa au milieu du chemin, écartant les bras.

•     - Attention vous approchez pas, le portail va exploser !

Tous semblaient décontenancés mais continuaient d'avancer dans sa direction. La température augmentait de plus en plus, puis une lueur derrière Ori, le cyborg levant le "bras" dans sa direction, un immense bruit émanant du portail, un projectile lumineux passant juste à côté d 'Ori, et enfin, le noir complet.