Ori était toujours sous le choc de la situation. Il faut dire que ce n'était pas une journée comme les autres. En allant voir le défilé des cortèges, il avait rencontré un homme étrange, qui s'avérait avoir fait exploser une caserne. Ori a essayé de le poursuivre, avant de se faire assommer par l'explosion d'un portail, puis s'est réveillé au palais royal et a assisté à une audience en présence du roi, de la matriarche Lola, du Champion Drakus, et d'un animagi hybride. Plutôt surprenant comme journée, il faudra raconter ça à

    - Hana ! Elle doit être tellement inquiète.

Ori était tellement perdu dans ses pensées qu'il n'avait pas remarqué qu'il venait d'interrompre une discussion de ses camarades d'audience. Ils avançaient dans un couloir du palais, accompagnés par la jeune fille, apparemment petite fille du roi, nommée Flore, et suivis d’un garde. La nuit commençait a tomber et les lunes reflétaient leur lumière sur la cape bleutée de Flore. Cette dernière, à l'avant du groupe, s'était arrêtée dans la lueur d'un vitrail. En fait tout le monde s'était arrêté et regardait Ori quelques pas derrière. Flore lui sourit et demanda :

    - Qui est Hana ? Elle est avec toi à l'orphelinat ?

Ori, gêné d'avoir interrompu tout le monde (ou peut-être d'avoir pensé si fort à Hana) se mit à rougir et baissa la tête, espérant que ses cheveux longs cachent ses joues roses

- Oui. C 'est une amie. Désolé je vous ai interrompu vous disiez quoi ?

Ils attendirent qu'Ori les rejoigne avant de reprendre la marche. Ylva, sourire en coin, passa le bras sur les épaules d'Ori.

- Ce n'est rien ne t'inquiète pas. On se disait qu'on n'était pas forcément en accord avec la décision du roi. En ce qui me concerne, j'ai reçu l'autorisation de partir à la recherche de cet homme et de l'arrêter en employant la force si besoin.

Le général Kuwanger haussa les sourcils surpris.

- Et quand est-ce que vous l'avez obtenue exactement ?

- Lors de l'audience, Mère m'a communiqué ses inquiétudes. Nous avons d'autres moyens de communiquer que la parole. Ça nous évite d'ouvrir la bouche pour dire des âneries... Comme provoquer son propre chef par exemple.

Nochi leva la main.

- Ah ! Je crois qu'on parle de moi. Désolé mais c'était trop tentant. Et puis j'étais frustré par l'autre fuyard. J'aime pas rester sur ma faim.

Ylva secoua la tête, visiblement désespérée.

    - Encore de la fierté d'homme mal placée...

    - Vous savez la fierté est le propre des humains. Répondit Kuwanger. Vous, vous êtes bien fière d 'être une valkyrie, de protéger votre "mère" au péril de votre vie...

    - Evidemment ! Je voue ma vie à la reine mère. Je suis prête à mourir pour elle.

    - Eh bien tout le monde n'en est pas capable. Alors continuez d'en être fière. Mais laissez notre pauvre camarade sans cervelle être fier de ses gros bras. De toute façon ça ne lui sera pas bien utile.

Ori aperçut une lueur de peine dans le regarde du général. Mais le groupe prit alors des escaliers en spirale et le général qui ouvrait la marche avec Flore baissa la tête et avança. Une fois en bas des escaliers, ils arrivèrent dans une petite pièce dont les murs étaient remplis d'étagères et de penderies. Certaines étaient vides, d'autres remplies d'effets personnels et de vêtements, et d'autres d'uniformes. Avant toute question, Flore expliqua :

    - Ce sont les vestiaires des employés. Nous allons sortir par une porte arrière pour éviter d'être vus.

    - Bonne idée répondit Kuwanger. Mais avant de sortir, dit-il en se retournant vers le groupe, nous devrions nous décider pour la suite.

    - C’est à dire ? Demanda Ozan

    - Eh bah Ylva semble décidée à partir chasser notre homme, moi j'suis à la retraite donc j'ai rien de mieux à faire...

Nochi le coupa

    - Moi je compte pas le laisser filer non plus. J'ai une baston à terminer avec lui...

    - Merci de me couper la parole pour la troisième fois aujourd'hui p'tite tête, mais oui. C'est le point que je voulais aborder. Je sais pas ce qu'il en est de toi Ozan, ou même Ori, mais autant qu'on unisse nos forces pour le rechercher, même si ça ne m'enchante pas de partir en voyage avec un idiot du village.

    - Attends c'est de moi que tu parles là ? Nochi s 'approcha à quelques centimètres du général.

    - Oh on dirait qu'il a compris. Il pourrait peut-être même aller à l'école.

Les deux hommes étaient face à face, presque collés. Et une grande épée vint descendre rapidement dans le petit interstice qui les séparait. Ylva avait dégainé et attendait maintenant le moindre mouvement

    - General Kuwanger, si vous voulez qu'on s'allie, il faudrait éviter de provoquer vos camarades. D'autant plus que si vous êtes général, comportez vous comme tel. Pas comme un enfant. Même nos jeunes amis sont plus matures que vous.

    - Vous avez raison... dit-il en reculant de quelques pas. Mais je n'ai ce grade que parce que je ne pouvais pas refuser la promotion. Ne m'appelez pas général. Surtout si on va faire un bout de chemin ensemble, appelez moi Kuwa. C'est plus simple.

    - Bien. Reprit Ylva. Alors, par où on commence ?

Nochi s'était visiblement calmé et partit s'asseoir dans un coin de la pièce, les bras croisés. Il était tellement large qu'il prenait la place de deux casiers, bousculant les affaires suspendues dedans. Ozan s'avança d 'un pas, tête baissée.

    - Bah faudrait déjà savoir par où on va. Vu que le portail qu'il a pris a explosé, on risque pas de savoir où aller. A moins qu'ils aient réussi à récupérer un bout de panneau pas cramé par l'explosion ?

Il s'était tourné vers Flore mais ne semblait pas vraiment convaincu. Elle secoua la tête.

    - Non... toute la zone autour du portail était brulée par l'explosion, et je n'ai aucune idée d'où emmenait ce portail.

Ori qui, comme à son habitude s'était caché discrètement dans un coin, leva la main.

    - Euh moi je sais... je l'ai vu avant que le portail explose.

Un sourire illumina Kuwa.

    - Ah enfin une bonne nouvelle ça ! Alors quel est notre cap ?

    - Avant de vous le dire j'aimerais que vous me promettiez une chose...

Un silence d'approbation s'installa. Ils semblaient tous plutôt intrigués par la requête d'Ori et le fixaient avec des yeux ronds ce qui le déstabilisait. Seule Flore ne semblait pas si surprise. Elle lui sourit en inclinant la tête, et ça conforta Ori dans son idée.

    - Emmenez-moi avec vous ! Je suis peut-être jeune mais je suis débrouillard, je vous gênerait pas. Cet homme... j'avais l'impression de le connaitre... je veux lui demander. Et puis c'est l'occasion de voyager et de découvrir autre chose que le même quartier de Potalu toute ma vie.

Ozan leva la tête au ciel l'air soulagé

    - Oh dieu merci oui ! J'avais peur de devoir supporter le voyage avec que des vieux qui se frittent en boucle. Parce que oui au cas où vous l'auriez oublié je suis le seul à avoir réussi à rattraper votre homme. Donc oui je viens avec vous, merci de m'avoir posé la question !

Kuwa et Ori éclatèrent de rire en cœur.

    - Et bah ça promet ce petit voyage alors, reprit le général. Moi je suis plutôt pour. Ça ne me dérange pas de vous avoir avec nous.

    - N'allez pas trop vite général, intervint Ylva avant de se pencher vers Ozan et Ori. Vous savez ça pourrait s'avérer dangereux. L'homme qu'on pourchasse a détruit une caserne, blessé des soldats, et fait exploser un portail. Je ne pense pas que ce soit une très bonne idée que vous partiez avec nous. Je ne voudrais pas avoir à expliquer à vos parents que vous avez été blessés sous ma garde.

Un long silence gêné s'installa. Ori voyait bien que les autres ne savaient pas trop quoi dire, alors il prit la parole.

    - Ylva... je vis dans un orphelinat... tu sais... le seul parent que j'ai c'est une vieille femme rabougrie qui se plaint tout le temps alors, c'est pas bien grave. Ça m'embête un peu de laisser Hana toute seule pour gérer les petits, mais je veux à tout prix quitter cet endroit...

Ylva, qui s'était aperçue avoir dit une bêtise, avait maintenant les mains sur sa bouche, comme si elle avait peur de dire autre chose de gênant. Puis elle se reprit.

    - Je suis vraiment désolée sœurette. Tu sais, je peux toucher un mot à la matriarche pour que tu puisses nous rejoindre. Nous sommes une grande famille.

    - Je suis toujours persuadé que tu n'es pas ma sœur mais est-ce que si je rejoins votre famille je pourrais venir à la chasse au méchant ?

Kuwanger s'avança d'un pas

    - Ori, les Valkyries sont des femmes guerrières ailées, tu ne pourras pas les rejoindre. D'autant plus qu'elles ne sont pas des plus sympathiques envers les hommes

    - En même temps si vous n'étiez pas inutiles... répondit Ylva avant que Kuwa reprenne.

    - Mais pour ce qui est de nous suivre, comme je l’ai dit j'suis plutôt pour. T'as l'air de t'y connaitre en runes et en portails alors ça nous sera utile (et puis si tu connais notre cap on n’a pas vraiment le choix).

Ylva fronçait maintenant les sourcils et Ori remarqua que ses ailes suivaient le mouvement

    - Non c'est hors de question ! Je ne laisserai pas deux enfants être blessés sous ma protection !

    - Et bah c'est parfait alors, intervint Nochi. Tu t'occuperas du babysitting, comme ça ils ne risqueront rien et tu laisseras les hommes faire le sale boulot. Le plan est parfait.

Ylva le gratifia d'un regard noir qui en disait long sur sa capacité à faire souffrir un homme en quelques secondes. Ori sauta sur l'occasion et fit son meilleur sourire à Ylva, comme il avait l'habitude de faire à Granma avant de lui demander quelque chose

    - Allez... steuplait... sœurette...

Ce dernier mot eu raison d’Ylva qui relâcha ses épaules et leva la tête au ciel

    - Bon... c 'est d 'accord.

    - Bien joué mec ! Dit Ozan à Ori en lui donnant un petit coup de coude.

Flore, toujours silencieuse depuis le début de cette conversation eut un petit rictus en regardant Ori ce qui le déstabilisa. Elle avait quelque chose d'étrange pensa Ori, quelque chose de presque mystique. Comme si elle pouvait lire à travers lui comme dans un livre ouvert. Kuwa reprit :

     - Alors c'est quoi notre destination ?

Tout le monde semblait accroché aux lèvres d'Ori espérant une réponse qui leur faciliterai la tâche...

    - Isse. Je ne sais pas où exactement mais le portail qu'il a pris allait vers Isse, le désert de glace.

Kuwa se gratta la tête l'air pensif.

    - Isse... ça fait une trotte. D'autant plus qu'on va devoir prendre un bateau du coup, vu que les autres portails sont perturbés.

Ylva reprit.

    - Et rien ne nous garantit qu'il soit toujours là-bas une fois qu'on y sera. Il a peut-être pris ce portail au hasard et cherche déjà à revenir ici.

    - En lui courant après on est passés devant une dizaine de portails, répondit Ozan. Je pense que si ça avait été du hasard il aurait pris ceux-là.

Nochi renchérit

    - De toute façon on n'a pas d'autre piste. La question c'est plutôt qui ici a un bateau sous la main ? Parce que moi non.

    - Moi ! Ozan levait la main. Enfin pas moi moi, mais mon oncle et ma tante vivent dans un village magus au nord des terres sauvages au bord de la mer. Ils vivent de la pêche donc je suppose qu'ils ont un bateau.

    - Ça me parait pas mal, continua Kuwa en regardant par la fenêtre. La nuit tombe. On devrait tous aller dormir et nous préparer pour le long voyage qui nous attend. Tous acquiescèrent. Ylva, Ozan, tenez. Kuwa leur tendit une poignée de pièces d'argent. Pour vous payer une nuit à l'auberge. Ori je pense que tu devrais rentrer à l'orphelinat. Ils doivent se faire du souci pour toi.

En effet, Ori avait "disparu" depuis la fin de matinée. Il voyait déjà Gran 'ma lui hurler dessus en arrivant. Mais bon elle était quand-même attachante cette vieille peau. Et puis, c'est elle qui l'a élevé, alors il faut au moins la prévenir du voyage (même si Ori doutait qu'elle le laisse partir si facilement).

    - Et toi petite tête débrouille toi. Je payerai rien à un combattant de Raï.

Flore intervint avant que Nochi ne s’énerve de nouveau

    - Bon bah je crois que c'est bon pour tout le monde. Elle se tourna vers le garde resté derrière elle. Amenez-les jusqu'à leur auberge et raccompagnez Ori à l'orphelinat s'il vous plait. Et je vous donne une permission pour demain.

    - Merci, votre majesté.

Elle fit un signe de main pour saluer le groupe et repartit