Cela faisait plusieurs heures que l'on s'agitait dans tous les sens pour effectuer l'annuel nettoyage de printemps. Drôle de rituel pour se motiver à récurer la maison familiale. Chacun s'était donné une partie de la maison sur laquelle travailler et j'étais bien sûr tombée sur le grenier. Je n'ai rien contre les greniers, mais celui de ma maison était … je ne sais pas. Comme toutes les gamines, j'avais grandi avec une peur grandissante pour ces espaces qui semblaient hors du temps : à la fois sombre et humide, personne n'y allait sans un objectif en tête, c'est-à-dire y déposer un énième carton plein de souvenirs.
Ma première mission était donc de les descendre dans le jardin et les éplucher un à un, en espérant trouver quelques trésors. Enfin, comme je l'ai déjà dit, j'avais déjà passé une bonne partie de la matinée à tous les descendre, si bien que j'avais dû perdre quelques centimètres dans l'opération. Je pouvais me permettre de souffler un peu, non ?
Je m'étirais de tout mon long, tout en inhalant l'air frais de la campagne. Nous étions en plein mois d'avril mais le soleil avait déjà repris ses droits et réchauffait les plaines humides pour y faire revivre la flore après un rude hiver. Ma peau ne semblait pas vraiment aimer ses rayons et gardait toujours un aspect pâle qui me donnait un air malade. Qui sait, mes parents de vampires avaient dû m'oublier devant un appartement citadin alors qu'ils étaient partis se désaltérer chez quelques passants. Ma foi tout était possible.
Mes parents passant par là, les bras pleins de meubles de bois massif, me jetèrent un regard accusateur alors je leur montrais d'un geste la montagne que j'avais construite. Mon père lâcha un rire et ils repartirent comme ils étaient arrivés. Bon, je m'étais assez reposée. Je reprenais ma chasse au trésor dans les cartons.
Il n'y avait rien de particulier : des recueil de photos dont mon grand-père ne voulaient pas se séparer ; des vêtements ayant appartenu à ma mère ; des vieux cahiers de cours, ce genre choses. J'étais un peu déçue, je n'allais visiblement pas découvrir un affreux secret de famille qui aurait remis en cause toute mon existence ! Non, ma famille était ce qu'il y avait de plus banal, mais d'un autre côté, n'était-ce pas mieux ? Alors que je divaguais, l'un des cartons glissa du haut d'une des piles que j'avais arrangé dans un fracas assourdissant. Par réflexe, j'avais placé mes mains sur mes oreilles et m'étais recroquevillée légèrement, alors quand je vis la vague de livres qui s'était déversée sur l'herbe encore humide, je grimaçais. D'un geste, j'en soulevais une partie d'une main que je replonge dans l'un des cartons et recommençais l'opération autant de fois qu'il était nécessaire. Je pouvais enfin souffler. L'un des livres que je venais de sauver retint mon attention : la couverture était recouverte de tissus violet cousus grossièrement, les pages semblaient avoir été lues et relues si bien que les coins étaient pour la plupart courbés mais pas vraiment abîmés. Était-ce l'ancien journal intime de ma mère ?
La curiosité prit possession de mes mains qui s'étaient déjà jetées sur la volume et avaient déjà soulevé la couverture. Mon enthousiasme redescendit d'un cran. Beyond the Light ? Un livre anglais ? Qu'est-ce que cela faisait dans les affaires de mes grand-parents ? Dans un deuxième temps, le sous-titre m'indiqua qu'il s'agissait d'un livre en français. Pourquoi pas. Mais qu'était Netherlon ? Cela devait être monde fantastique, ce n'était pas étonnant connaissant les goûts de jeune fille de ma mère. Je feuilletais les premières pages, survolant le texte, décidément ce n'était pas le genre de roman qui me plaisait, pourquoi donner des noms aussi extravagants à des personnages ? Je ne comprendrai jamais ces pseudo-auteurs qui croient pouvoir tout réinventer juste parce qu'ils se croient doués. Je me bloquais quelques instants, mais c'était un livre écrit à la main ! L'écriture était très soignée, peut-être était-ce pour cela que j'ai d'abord cru qu'il s'agissait d'une publication. Non je devais être simplement étourdie. Alors que je riais de moi, une feuille sortit du volume pour atterrir entre jambes. Qu'est-ce que c'était ? L'écriture était la même que celle dans le livre.
« Si tu lis cette note c'est que j'ai réussi à parvenir jusqu'à ton époque. S'il te plaît ne soit pas effrayé(e) par ces livres et cette petite feuille. Prends le temps de les lire et comprendre mon problème. »
« Ces livres » ? Mais je n'en ai qu'un. Ma curiosité me titillant, je me suis repenchée dans les cartons à la recherche de livres possédant le même genre de couverture mais je n'ai rien trouvé. Déçue, je me suis réinstallée confortablement sur le sol et repris la lecture.
« Pour l'instant je n'ai pu envoyer que le premier livre avec cette note. »
Ah. J'aurais juste dû finir de lire la note. Je concentrais maintenant tout mon attention sur ce bout de papier. J'étais quelque part curieuse de découvrir ce qu'il pouvait m'apprendre, je me cachais derrière la montagne d'affaires ainsi j'étais sûre de ne pas être dérangée et repris la lecture.
« Mais la suite arrivera un peu plus tard, je ne suis même pas sûre que cela arrive vraiment quelque part mais je reste optimiste. De toute façon je le saurai. »
Comment est-ce qu'elle le saurait ? Oui j'assume que l'expéditeur de ce livre est une femme au vu du « sûre ». Cette histoire me paraissait un peu bizarre quand même, elle parle d'époque et semble ne pas être sûre de savoir qui recevrait son livre. Était-ce une blague de ma grand-mère pour me faire lire ? Je savais qu'elle aimait les aventures et les chasses aux trésors mais depuis son accident elle avait déversé toute sa passion dans l'écriture. Je me souviens qu'étant plus jeune j'adorais lire à ses côtés lorsqu'on lui rendait visite. Me souvenir d'elle maintenant faisait monter les larmes aux yeux. Je me demande si elle me voyait de là où elle était.
« En attendant, prends ce livre comme une histoire normale, tu décideras de ce que tu voudras en faire seulement après l'avoir lu. Mais je suis sûre que tu accompliras ta mission.
A très bientôt.
I.G.F. »
Je fus un peu déçue par cette fin alambiqué, ça me laissait sur ma faim mais j'avais cette irrésistible envie de lire à présent. Quelques pages ne pouvaient pas me tuer .. ?
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