"Vide". C'était le mot parfait pour décrire l'ambiance démarrant l'histoire que je vais vous raconter aujourd'hui. Elle se passe du point de vue d'un jeune homme, aux cheveux clairs et aux yeux vifs, nommé Dylis. Il fallait croire que dans ce drôle de monde aux possibilités étranges, quelqu'un comme lui possédait des capacités lui permettant de se retrouver dans un endroit pour le moins particulier... "Vide". Tout était si blanc... Si pâle... Il était difficile de distinguer les limites de quelconques murs, ou de plafond. On pouvait cependant apercevoir, plus ou moins, des formes. Blanches également. Difficiles à distinguer, mais on pouvait les sentir grâce à leurs mouvements précis. droits. Rapides... Mais ce n'était pas ces formes, ce que Dylis cherchait dans cet espace. Loin de là. Il cherchait un tout autre endroit. Bien plus profond... Bien plus riche... Après une brève analyse de ce lieu semblant sans issue, le jeune homme regarda droit devant lui. Il prit une inspiration et finit par dire, d'une voix hésitante :
"Je suis là..."
Ces simples mots semblaient résonner dans cet espace vide, où Dylis se sentait si seul, malgré les formes qui bougeaient. Il regardait encore. A gauche. A droite. L'air un peu paniqué !... Ouf. ça avait marché. C'est ce qu'il se disait en voyant un étrange contour apparaître, dessinant une forme rectangulaire... Puis l'intérieur de ce même rectangle se transforma en un espace ouvert, coloré, accueillant... Espace dans lequel Dylis s'approcha, petit à petit, comme s'il allait passer une porte. Combien de temps ? Combien de pas ? Avec cette étrange toile comme seul indice pour se repérer, c'était difficile à dire... Mais ce genre de détails n'importe peu, n'est-ce pas ? Avançons vers l'objectif... Peu importe le temps qu'il faudra.
Et nous y voilà. Un tout autre cadre, hein ? Totalement opposée à ce que l'on a pu voir précédemment, ici, il y avait plein de couleurs. Principalement du bleu, appartenant à un ciel vif, parsemé de quelques tâches de nuages blancs. Beaucoup de vert, aussi. Sous plein de nuances. Et parfois, accompagnant cette verdure, des pointes de jaune. De rose. Des jolis pétales finement colorés. L'endroit parfait et calme pour passer un bon moment à plusieurs ! Et c'est justement ce qu'un petit groupe de personnes semblaient faire, autour d'un barbecue. Il y en avait des plus grands, il y en avait des plus petits. Au vu de leurs points communs physiquement parlant avec Dylis, et surtout le grand sourire de ce dernier, le lien qu'il partageait avec eux était évident. Il se décida à avancer, encore. Mais cette fois-ci, il s'arrêta au premier pas posé. Plus précisément, il s'était arrêté suite à la question d'une petite fille dans le groupe.
"Dylis ne viendra pas, cette fois non plus ?"
La question fit perdre rapidement le sourire au jeune homme. Ainsi qu'à certaines personnes de ce groupe. L'attention du protagoniste se porta plus particulièrement sur deux personnes. Une femme douce et gracieuse, et un grand homme assez frêle, semblant tous les deux à la fois déçu et énervés par cette question.
"Désolée, répondit la personne féminine."
Le jeune homme n'arrivait plus à regarder la scène. Voir ce changement soudain lui brisait le cœur. Il avait envie de fuir... Lâchement. Mais il n'arrivait pas à bouger. Dans un sens où dans l'autre.
Aurais-tu peur même de la fuite, du regret possible d'un tel choix ? A moins que le doute te saisit, encore une fois ? Pourtant, tu as fait tout ce chemin jusqu'ici. Ce n'est pas pour bêtement revenir en arrière, tu ne crois pas ? Si tu fais de ton mieux pour continuer, tout se passera bien, non ? Allez... Avance, encore un peu…
"Je suis là !"
Tandis qu'il marchait en direction du groupe, avec de grands gestes, Dylis les appela. Voyant ces derniers tourner la tête en sa direction, le jeune homme arbora une expression rayonnante... Ils l'avaient vu ! Il était avec eux ! Enfin ! L'ambiance devenait de plus en plus joyeuse, de plus en plus vive, mais tellement agréable ! Dylis passait un si bon moment avec ses proches dans ce cadre chaleureux, ce drôle d'instant présent... Il était maintenant assis dans l'herbe, regardant le ciel qui s'était légèrement assombri. A ses côtés s'était posé le grand homme frêle de tout à l'heure, lui aussi abordant un grand sourire sur son visage. Le plus jeune continua de regarder en haut, pensif... Après une inspiration, il s'apprêta à parler, au moment où le plus grand lui coupa la possibilité de parler.
"Tu sais très bien que ta présence en ce lieu n'est pas réelle, Dylis."
A ces mots, un contour se dessina, passant sous les pieds du jeune homme, l'encerclant... Ce qui le fit tomber, traversant pendant un long instant le vide, sombre.
Il atterrit sur ce qui semblait être une sorte de siège. Du moins, c'est ce qu'il arrivait à distinguer au toucher, parce que son sens de la vue ne servait actuellement pas à grand-chose. Le noir, et quelques vagues nuances, envahissaient toute cette pièce. Plissant les yeux, Dylis chercha tout de même quelque chose. Une présence ? Une réponse ? Quoi que ce soit ? Ses petits instants de panique s'arrêtèrent au moment où une grande lumière blanche apparut, illuminant un mur complet... Mais les émotions négatives du jeune homme remontèrent aussitôt à la surface au moment où il comprit ce qu'affichait cette drôle de lumière.
On y apercevait Dylis, semblant un peu plus jeune que dans "l'instant présent". Devant lui se tenait ce fameux grand homme frêle. Que ce soit l'un ou l'autre, les deux tenaient une expression de colère sur leur visage.
"Tu ne m'empêcheras pas de faire ce que je veux ! criait l'image de Dylis.
- Réfléchis un peu avant de choisir une voie aussi insensée ! répondit le plus grand."
La projection de Dylis plus jeune serrait un objet contre lui. Quelque chose que le jeune homme connaissait parfaitement : un violon.
"Pour une fois que je vais faire quelque chose de risqué, mais que j'ai vraiment envie de faire, tu vas me laisser !
- Mais bon sang, Dylis ! Ecoutes moi un peu au moins, non ?!"
Le jeune homme de "l'instant présent" en avait assez. Il essaya de bouger, mais se rendit bien vite compte qu'il ne pouvait pas actuellement, ses mains se retrouvant liées au siège... Cette fois-ci, il haussa la voix, essayant de se montrer calme malgré ses yeux devenant humides.
"Je suis là, maintenant ! Alors arrête de me faire du mal comme ça ! Je suis venu... Je suis venu pour parler. Pour t'écouter... Et que tu m'écoutes, alors s'il te plait... Arrêtes."
La lumière s'éteignit. Ce qui liait les mains de Dylis avaient disparu. Tout était noir à nouveau, pendant quelques instants. Un dernier contour se dessina, prenant l'espace de tout le mur où s'affichait la projection. Le jeune homme s'y rendit sans plus attendre... Et il y arriva. Enfin. C'était l'endroit qu'il cherchait.
Cette fameuse destination... Il s'agissait juste de quatre murs, parsemé de tableaux. Sur ces toiles, on pouvait y voir l'histoire d'un homme. Un homme qui avait visiblement une vie bien remplie ! Il rêvait apparemment d'être peintre, mais il n'avait jamais réussi à percer, se trouvant pendant longtemps sans sou. Il arriva à se rationnaliser pour prendre un métier plus stable lors qu'il rencontra une douce jeune femme, avec qui il fonda une famille. Toutes ces toiles étaient observées par Dylis, mais aussi par une espèce de forme, assez difficile à décrire... Mais elle semblait proche d'une apparence humaine, d'un grand homme assez frêle, plutôt ressemblant au protagoniste de ses toiles... C'est vers cette forme que Dylis s'approcha, les yeux toujours humides malgré un grand sourire.
"Je suis là, Papa."
La drôle de forme tourna légèrement la tête vers la voix qui l'interpellait avant d'esquisser une expression souriante en retour. Sans plus attendre, elle serra le jeune homme dans ses bras. Même si Dylis ne sentait pas réellement la pression, suite à l'état physique étrange de cette forme qu'incarnait son père, l'action en elle-même lui fit verser quelques chaudes larmes. Il rendit l'accolade comme il le pouvait. Mais quel bonheur ! Quelle joie de pouvoir se sentir heureux, dans les bras de son père, comme il y a si longtemps. Si longtemps avant ce fameux départ... Dylis regarda les tableaux, pouvant observer ainsi une partie de l'histoire qu'il n'avait jamais connu.
"C'était pour ça que tu ne voulais pas ? Pour ne pas que je répète tes erreurs ?"
La forme hocha la tête en guise de réponse. Suite à quoi Dylis se desserra de l'étreinte, et profita du temps présent pour répondre... Calmement. Posément. Entretenir une réelle discussion.
"Je comprends tout à fait ton appréhension. Et tu... Tu n'as pas totalement tort. Le début était très... Difficile. Plusieurs fois, j'ai échoué. Entre la compétition et la possibilité de trouver quelque chose dans un domaine aussi compliqué que la musique... Je songeais souvent à tout arrêter... Mais l'idée de revenir et de voir que tu avais raison était encore pire... C'est stupide, non ?"
Le jeune homme prit une pause, assez déboussolé. Voir l'expression presque moqueuse de la drôle de forme se trouvant devant lui n'aidait en rien, évidemment ! Mais ce n'est rien... Il n'était pas ici pour être triste, non ? Bien au contraire... Il se remit à sourire, comme pour s'encourager.
" Mais tu sais quoi ? continua-t-il. J'ai réussi ! Ce n'est qu'un départ, pour l'instant... Mais plusieurs personnes m'ont reconnu ! Et je vais travailler en tant que musicien pour des spectacles, en salle... Comme quoi, j'ai bien fait de m'acharner ! Tu as vu Papa ? Je suis quelqu'un de courageux... Et je voulais t'en parler... Tant que je... Que tu..."
Mince. Il s'était promis de ne pas être triste. Mais voilà qu'il s'est remis à pleurer... Beaucoup. Tellement qu'il n'arrivait plus à parler et finir sa phrase... Tu parles de quelqu'un de courageux ! La drôle de forme ne jugea cependant pas. Elle lui tapota le dos, comme si elle était habituée à ce comportement venant de Dylis... Malgré la tristesse de ce dernier, elle continua d'esquisser un sourire. Elle se mit enfin à parler !
"Ce n'est rien. Tu es venu finalement... Tu as pris le temps qu'il te fallait, mais je suis heureux de voir tout ce que tu as fait... Accomplir tes rêves, là où j'ai échoué. Pris le courage de venir me voir, maintenant... Je suis fier de toi, mon fils."
... Tellement d'émotions qui passaient dans la tête du jeune homme... Il était si heureux d'entendre enfin ces mots ! Mais si triste... Si fier de lui ! Et tellement triste... Tant de joie d'un coup... Mais tellement de tristesse, l'empêchant de répondre. Son père continua de le rassurer par des doux gestes d'affection.
"Ne t'en fais pas... Je suis là. C'est tout ce qui compte... Et je serai toujours là... Ne l'oublie pas."
Le jeune homme hocha doucement la tête, essuyant au mieux ses dernières larmes, et surtout, profitant de l'affection de son père, rattrapant ces dernières années... Prenant tout le temps qu'il fallait pour se poser... Pour se calmer... Pour profiter de cet "instant présent"... Il s'apaisa petit à petit, fermant les yeux...
Une fois rouverts, il était à nouveau dans un tout autre endroit. Moins apaisant... Plus froid... Plus réaliste. Malgré les formes bien plus faciles à distinguer qu'auparavent, il y avait à nouveau tout ce blanc, et maintenant ces murs, ce sol... Ce lit dans lequel se trouvait le père de Dylis, endormi, accompagné de plusieurs appareils. Le jeune homme se tenait à côté de lui, lui tenant la main. Ces mains sur lesquelles se trouvaient quelques gouttes de larmes, appartenant à une personne sensible... Qui s'arma de son courage pour sourire, malgré la situation.
"Merci... Papa."
Le temps passait. Les jours passaient. Le jeune homme poursuivit ses rêves, s'armant de son courage pour affronter la difficulté. Le peu d'argent... La compétition... Ce n'était pas grave. Il arriverait à tout stabiliser. Petit à petit... Et de temps à autres, il allait dans cette chambre froide d'hôpital, avec un sourire chaleureux. Parlant à son père. Lui racontant ses aventures. Parfois même il venait avec son violon pour lui jouer un air ! Il avait fini par créer une mélodie rien que pour lui, essayant de le représenter. Il avait composé dans une pièce spéciale, qui a toujours le don de l'inspirer... Chez lui, entouré des tableaux de son père, qu'il avait pu récupérer de chez sa famille à qui il reparlait aussi. Bien-sûr, il adorait jouer de cette fameuse mélodie quand il venait voir son père. Et même quand ce dernier était parti pour de bon. Il la jouait toujours, de temps en temps... Cherchant inspiration et réconfort dans sa précieuse pièce. Car il avait raison. D'une certaine façon... Il sera toujours là.
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