POV Yui:
Je m'empressai de rejoindre Kumo pour comprendre ce qui le rendait si triste.
“ Kumo, est-ce que tout va bien ? Est-ce à cause des pissenlits que j’ai soufflés ?” demandai-je, craignant d’avoir fait une erreur.
Sans m’en rendre compte, j'avais fait voler presque tous les pissenlits du champ, leur douceur emportée par le vent.
“ Ah, non, pas du tout ! Tout va bien, nya ! ” répondit-il avec un enthousiasme soudain, comme s’il cherchait à me rassurer tout en cachant ses véritables émotions.
Même s’il disait aller bien, je sentais qu'il voulait me dire autre chose, mais il préférait changer de sujet.
“ Nya, regarde toutes ces grenades florales ! ” s’exclama-t-il en ramassant quelques boules fleuries tombées au sol, les examinant d’un œil curieux.
Je ramassai une de ces “ grenades florales ”, des sphères végétales couvertes de pétales délicats, leur donnant l’apparence de petites fleurs explosant de couleurs. Leur apparence était envoûtante, et je me dis qu’elles pourraient m’être utiles plus tard.
“ Je vais en garder quelques-unes, elles sont vraiment magnifiques. ” murmurai-je, mettant délicatement les grenades dans ma poche, les pétales chatoyant légèrement sous le soleil.
Je jetai un dernier regard sur le champ que j’avais accidentellement dénudé.
“ Qu’est-ce qu’on va faire du reste des objets ? J’espère que je n’aurai pas de problèmes pour avoir... abîmé cet endroit. ” dis-je avec une légère inquiétude, en cherchant le mot juste, encore incertaine de la gravité de ma petite maladresse.
Kumo secoua la tête.
“ Les pissenlits repousseront vite, ne t’en fais pas nya. Puis de toute façon, le champ n’appartient à personne, tout le monde va et vient comme bon lui semble.” répondit Kumo, un sourire rassurant aux lèvres.
Alors que nous échangions quelques mots, le papillon bleu aux ailes cristallines et lumineuses traversa doucement l’air entre nous, avant de s’éloigner lentement. Il vola gracieusement dans une direction précise, puis s’arrêta, flottant comme s’il nous attendait.
Nous échangeâmes un regard intrigué avant de faire quelques pas dans sa direction. À notre grande surprise, le papillon reprit son vol dès que nous nous approchâmes, mais s’immobilisa à nouveau dès que nous nous arrêtâmes. Il semblait clairement nous guider quelque part.
Sans hésiter davantage, nous décidâmes de suivre le papillon.
Plus nous avancions, plus le chemin devenait sombre. Les arbres autour de nous se dressaient comme des ombres géantes, leurs branches noueuses formant des arches inquiétantes au-dessus de nos têtes. La lumière du soleil se faisait rare, filtrant à peine à travers le feuillage dense, et une brume légère s’élevait du sol, rendant l’atmosphère de plus en plus lugubre.
Nous marchions en silence, seulement accompagnés par le bruissement du vent dans les feuilles et le battement régulier des ailes du papillon.
Bientôt, la végétation s’éclaircit, et devant nous se dressa une citadelle sombre, massive, faite de pierre noire et de rochers anciens, recouverte de lierre. Les murs semblaient absorber la lumière, et l’ensemble de la structure dégageait une aura de mystère et de tristesse. Les ombres dansaient autour de ses murs, rendant l’endroit encore plus inquiétant.
“ Nyaa ! Le Château des Murmures ! On dit que ce lieu est hanté… Personne n’ose y entrer ni même s’en approcher. ” murmura Kumo, visiblement effrayé, son pelage hérissé par l’appréhension.
Mon coeur se serra. Je partageais sa peur, un frisson me parcourut l’échine, mais une force invisible me poussait à avancer malgré tout, comme si quelque chose m’attirait irrésistiblement vers ce lieu. Ou quelqu’un qui m’appelait.
Nous continuâmes à suivre le papillon, qui se dirigeait droit vers les grandes portes de la citadelle. Plus nous approchions, plus l’air semblait se charger de mélancolie et de souvenirs anciens. Les pierres noires du château étaient couvertes de mousse, et des ronces s’entremêlaient autour des colonnes, comme pour retenir quiconque souhaiterait y entrer.
Le trajet, bien que court, sembla durer une éternité. Chaque pas résonnait dans le silence oppressant qui nous entourait.
Enfin, nous nous trouvâmes face aux imposantes portes du château, d’un bois si sombre qu’il paraissait absorber toute la lumière. À ma grande surprise, les portes s’ouvrirent lentement d’elles-mêmes, dans un grincement sinistre.
L’intérieur était plongé dans l’obscurité, une obscurité si profonde que l’on aurait dit que la lumière avait abandonné cet endroit depuis des siècles. Seules quelques lueurs spectrales s’échappaient des fentes dans les murs.
“ Il fait sombre… Comment allons-nous faire pour y voir quelque chose ? ” demandai-je, incertaine, la voix tremblante.
“ Nyehe, tadaaa ! ” s’exclama Kumo avec un éclat dans les yeux, sortant de sa poche une petite fleur de lumière qu’il avait trouvée dans le champ.
La fleur s’illumina d’une douce lueur dorée, projetant une lumière réconfortante autour de nous et révélant peu à peu les détails du grand hall dans lequel nous venions d’entrer.
“ Tu gères, Kumo ! ” m’exclamai-je, impressionnée par sa trouvaille, et soulagée en même temps.
Nous avançâmes prudemment dans le manoir, éclairés par la fleur de Kumo. Les murs étaient nus, faits de pierre froide, et le sol recouvert d’une épaisse couche de poussière, comme si personne n’avait foulé ces lieux depuis des décennies.
De vieux tapis, rongés par le temps, traînaient sur le sol, et des toiles d’araignée pendaient aux coins des plafonds voûtés. Chaque pas soulevait un nuage de poussière, et l’air sentait l’humidité et la pierre vieille.
Des portraits anciens, aux visages effacés par le temps, nous regardaient avec des yeux vides. Le manoir semblait figé dans le temps, comme si la vie l’avait quitté depuis des siècles.
Nous arrivâmes bientôt au pied d’un escalier en colimaçon, son bois craquant sous nos pas. Alors que nous montions lentement les marches, des murmures résonnèrent, semblant provenir de l’étage supérieur. Ils étaient faibles, à peine audibles, mais portaient en eux une tristesse palpable, presque oppressante.
“ NYAAA ! C’est l’esprit qui hante cette demeure, c’est sûr ! On doit partir vite ! ” s’écria Kumo, sa voix tremblante de terreur, tout en se recroquevillant.
Kumo tirait désespérément ma manche pour m’entraîner vers la sortie, m’incitant à fuir.
Mais mon corps refusait de bouger. Ces murmures m’attiraient irrésistiblement, comme un appel que je ne pouvais ignorer. Chaque mot semblait chargé d’une peine immense, comme un écho lointain de souvenirs douloureux.
“ Je vais aller voir ce qui se passe en haut. ” déclarai-je, la voix tremblante mais déterminée.
“ NYAA, t’es folle ?! ” protesta Kumo, horrifié, son pelage tout hérissé par le peur.
“ Attends-moi ici alors, je reviens. ” ajoutai-je, tentant de le rassurer.
“ Hmpf, qui a dit que je comptais te suivre ? ” grogna-t-il, faussement bravache.
Mais dès que je montai quelques marches, il s’empressa de me rejoindre.
“ Nya, ne me laisse pas tout seul ici ! ” gémit-il.
L’escalier en colimaçon semblait interminable. Chaque marche grinçait sous nos poids. Plus nous montions, plus les murmures devenaient clairs, leur tristesse se faisant de plus en plus présente.
Mon cœur battait à tout rompre, partagé entre la peur et la curiosité. J’éprouvais une étrange fascination à cause de ces voix.
Je pouvais sentir Kumo trembler derrière moi, sa peur étant presque palpable.
Enfin, nous atteignîmes l’étage supérieur. L’endroit était plongé dans une pénombre encore plus pesante. Une grande salle se déployait devant nous, les fenêtres étaient obstruées par des rideaux épais et poussiéreux, laissant à peine entrer un rayon de lumière.
Tout autour de nous, il y avait un sol jonché de feuilles éparpillées, couvertes de gribouillis et de croquis inachevés.
Des dessins froissés éparpillés partout, témoignant des nombreuses tentatives désespérées de capturer un souvenir lointain.
Au centre de la pièce, se tenait un grand chat, au pelage gris et usé, ses yeux fixés sur un dessin devant lui. Il murmurait sans cesse une description, comme s’il cherchait à se souvenir de quelque chose ou plutôt de quelqu’un. Il semblait perdu dans ses souvenirs.
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