Chère Abigail,

J’espère que vous avez pu vous éviter d’attraper mal, l’autre soir, et que vous n’avez plus de troubles.

Comment vous sentez-vous depuis ?

Sachez que j’ai beaucoup pensé à vous aujourd’hui, car je suis allée me distraire à la ferme, mais l’occupation paraît presque vaine maintenant sans compagnie, en particulier la vôtre. Il vous faudra revenir car je ne peux pas laisser de côté mes animaux et ma production aux mains de métayers.

J’ai fait envoyer une tenue de ferme qui devrait être à votre taille chez vous. J’espère que la couleur vous siéra. J’ai pris soin de vous choisir un bonnet et un corselet. Pour les chaussures, nous devrons encore chercher.

Aujourd’hui, j’ai repris mon traité de botanique et ait effectivement trouvé un chapitre sur l’entretien des plants de roses, et comment en réaliser des boutures efficaces. J’imagine que cela vous intéressera. 

Prenez soin de vous.

Violet.

Chère Violet

Tout va bien, je vous rassure, je suis rentrée sans me causer le moindre mal. J’ai malheureusement pour habitude de prendre vite mal en ce qu’il s’agit du froid. J’y veillerais plus attentivement, maintenant que je constate que cela peut causer trouble à autrui.

Je tenais avant toute chose à vous remercier pour le moment que nous avons partagé, et en particulier le contact que nous avons eu. Il m’est très précieux. 

Je n’ai pour ainsi dire pas eu de moments de complicité ainsi depuis longtemps et le partager avec vous en particulier l’a rendu plus intense que je ne l’ai jamais vécu.

Sur un tout autre sujet, sachez que j’avance doucement dans ma lecture des nombreux romans que vous m’avez offerts. Je tiens à dire que vous n’auriez pas dû m'en offrir autant, mais je vous en remercie néanmoins.

Nous avons bien reçu également la tenue de ferme. Peut-être devriez vous limiter vos cadeaux en quantité, j’ai peur d’alimenter les suspicions de mon entourage. Mais sachez que je suis gré de chacune de vos attentions. Abigail.

Chère Abigail,

Seule vous, ma chère, peut bien vouloir remercier sa partenaire d’un simple baiser. 

Les remerciements ne sont pas nécessaires car le plaisir a été dûment partagé et que j’attends avec beaucoup d’impatience le loisir de pouvoir recommencer.

Je suis ravie d’apprendre que cet instant est précieux pour nous deux.

A propos de votre requête de me limiter dans mes attentions envers vous, j’ai bien peur de devoir refuser. Vous n’êtes pas assez gâtée par votre entourage qui devrait louer le ciel tous les jours d’avoir la chance de vous avoir à leur côté, alors je compte bien corriger le tir et vous louer tout mon soûl.

A propos, je voulais savoir si vous me feriez le plaisir de m’accompagner pour un thé dans les prochains jours. Celui qui vous sierra, je me rendrais disponible à n’importe quel moment pour avoir l’opportunité de vous retrouver.

Je tiens à préciser que ce thé se fera en tête à tête.

Violet

Chère Violet

J’espère que vous vous portez bien en recevant ma missive. Comme vous avez du le remarquer, j’y ai mis quelques pétales des roses de ma roseraie pour la parfumer. Sentez-vous leur parfum exquis ? Elles font mon ravissement chaque matin pour le thé.

Concernant votre thé, si le jour est selon ma préférence, je choisirais dès demain. Je ne supporte plus votre absence, et je ressens le besoin de vous revoir très vite.

Rien que de penser au plaisir de vous retrouver, les larmes montent aux joues, et je me dois de m’enquérir d’un mouchoir. 

Cet après-midi, j’ai tâché de m’occuper avec une de vos lectures. Ne pensez pas que je ne me distrais qu’avec cela, j’ai bien d’autres occupations, mais celle-ci me rappelle votre visite et je me trouve uniquement enthousiaste pour ceci ces derniers jours : la lecture, et la rédaction de nos échanges.

Je me languis de recevoir votre prochaine lettre. Saviez-vous que votre écriture est tout à fait ravissante ?

Abigail

Chère Abigail

Je me porte bien, je vous en remercie.

Sachez que je me réjouis de pouvoir être la personne qui vous libère de ce moindre mal. Je vais être tout à fait honnête, bien que nous nous voyions cet après-midi, votre contact me manque.

Je me trouve à chercher votre image partout où se porte mon regard : dans les nuages, dans la terre, à l’horizon… Mes yeux fatiguent mais l’idée qu’il puisse se poser sur vous en cette brillante journée les réconforte.

Étant donné que vous avez dit apprécier mes écrits, bien que nous nous voyions aujourd’hui, j’ai décidé de prendre la plume pour occuper le temps atrocement long qui précède votre arrivée. Par contre, concernant mon écriture, je dois à la vérité de vous contredire : j’ai une rédaction on ne peut plus banale et la forme de mes lettres est de loin inférieure aux votres. Je ne me plains pas de ce fait, je me connais d’autres qualités, mais je refuse qu’on m’en prête que je ne possède pas.

Soyez douces avec moi, et flattez moi dans une prochaine lettre avec une qualité que je possède effectivement. Violet.

Chère Violet

Je vous remercie encore pour cet après-midi passé ensemble. Il m’a été d’un grand réconfort. 

Concernant votre écriture, je suis désolée que mon compliment ait si mauvais accueil, il était sincère. 

A propos de votre demande de flatterie, je ne peux y répondre sincèrement, celles-ci ne me viennent spontanément que par moments et je ne peux le forcer sans risquer de dire du tort.

Je vais être honnête avec vous, il y a autre chose qui me trouble que votre absence, c’est le regret de ne pas vous avoir rencontrée plus tôt. Je m’imagine plus jeune, heureuse de rencontrer l’amour avec vous et de chercher à le vivre pleinement tous les jours qui passent. Malheureusement, ce doux rêve nous est impossible.

Je ne sais toujours pas comment vivre cette situation sans avoir la culpabilité de faire du mal à mon époux.

Vous connaissez l’absence de sentiment qui emplit malgré tout mon mariage mais mentir n’est pas dans ma nature, et je souffre de vivre ainsi l’aventure qu’est la notre.

Abigail

Chère Abigail

J’espère que la tempête de la nuit derrière ne vous a pas trop effrayé. J’ai pensé à vous, en espérant que vous ne seriez pas sous la pluie durant l’orage. Je connais votre attirance pour les temps électriques, mais il vous faut vous retenir pour votre bien, et commencer à les apprécier depuis votre fenêtre, à l’abri, avec une couette et un thé noir comme vous les aimez.

Au sujet de vos préoccupations, si cela peut vous apporter une quelconque consolation, pour ma part, je me réjouis de vous avoir rencontré. Je ne pense pas que vous m’auriez appréciée comme vous le faîtes aujourd’hui si nous nous étions rencontrées dans ma jeunesse, j’avais un fort caractère moins avenant. Le temps a fait son travail pour que nous puissions nous rencontrer le jour où nous étions prêtes pour cela.

Et concernant votre époux, que je devine être un plus grand trouble, et bien qu’il aille au diable. Peut-il seulement être appelé un époux, à vous délaisser aussi longtemps sans même apporter de nouvelles ? Je suis désolée pour mes mots crus, mais la vérité comme je la pense se doit d’être dite.

Violet.

Chère Violet

Je vous rassure, je n’ai pas été sous la pluie depuis la fois où vous m’avez vu mal.

Vos mots m’ont réconforté. Effectivement, je ne sais pas si vous m’auriez appréciée non plus si vous m’aviez rencontrée plus tôt. Mais une petite part de moi me confie que nous étions faîtes pour nous rencontrer tôt ou tard, et je suis ravie que ce soit chose faite.

Je vous prie de ne pas parler mal de mon époux. Malgré son absence, il reste un homme bon et je suis sûre que vous sauriez apprécier son caractère si vous le rencontriez. Lawrence n’est pas une mauvaise personne, et je pense qu’il serait plus présent s’il partageait des sentiments sincères à mon égard. Mais son honnêteté l’oblige à vivre avec une absence de sentiments envers son épouse, malgré le devoir qu’il a envers elle. Cela doit être aussi difficile pour lui que ça ne l’est pour moi.

Abigail

Chère Abigail,

Je vous assure que je ne souhaite nullement rencontrer votre époux, l’homme qui m’enlève le plaisir de mon existence, simplement car il est arrivé plus tôt que moi. Et de ce que je connais de lui, je puis vous assurer que son caractère m’est exécrable au point ou je ne puis supporter plus longtemps de gâcher nos échanges en discutant de lui. 

Par égard pour vous, je veillerais à ne plus parler de lui, car j’ai peur de ne pas pouvoir en parler en bien.

Je souffre de voir nos doux échanges se noircir par sa simple présence.

S’il vous plaît, adoucissez mon mal en me promettant de nous revoir.

Vous ai-je dit que je cherche votre parfum dans toutes mes fleurs sans l’apercevoir ? Il me faudra vous offrir un mouchoir pour que vous y déposiez quelques fragrances. Je vous promets que cela rendra nos séparations moins difficiles.

Violet

Chère Violet

Je vous propose effectivement que nous ne parlions plus de mon mari pour le moment.

Concernant votre première demande, je vous avoue que je sens également le manque de votre présence. J’aimerais vous faire rencontrer Bernard qui me tient compagnie durant nos séparations.

Au sujet du mouchoir, j’accepte volontiers, à la condition que vous fassiez de même avec mon mouchoir. Même si je crois bien reconnaître des effluves dans les roses du jardin, la différence est si légère mais présente et je souhaite pouvoir apprécier le raffinement de votre senteur. Violet, je dois vous avouer, j’ai une autre peine à vous confier. Nos rendez-vous font mon bonheur, mais il y a une chose qui me manque. C’est le plaisir de pouvoir vous tenir la main dans un lieu public quelconque comme n’importe quel couple.

Devoir nous cacher alors que notre amour est des plus profonds et sincères me déchire.

Abigail

Chère Abigail,

Auquel cas, j’aurais une solution à vous proposer. Mais il faudra me promettre de mettre vos moins beaux habits et une coiffure moins sophistiquée que ce dont vous avez l’habitude. Nous nous rejoindrons à Ferneham près de la fontaine à midi. 

Violet