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Avertissements : Cette nouvelle aborde la perte et la mort ainsi que la mélancolie qui y est rattachée. Ne la lisez pas si vous n’avez pas le moral et/ou si vous n’êtes pas à l’aise avec ces thématiques. Merci !
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Depuis que les yeux de sa compagne s’étaient fermés, elle avait
vécu dans un épais brouillard qui avait troublé ses sens ainsi que sa
perception du temps. Sa vie déjà longue semblait s’être étiolée davantage.
Et pourtant, au désespoir des débuts, s’était maintenant substituée une peur toujours plus grandissante. Car avec le temps, une seconde perte l’avait attendue, tapie insidieusement dans son esprit.
Et c’étaient maintenant les souvenirs qu’elle avait de sa compagne la quittaient eux aussi.
Elle avait d’abord oublié sa voix, qu’elle savait pourtant avoir été aussi douce et chaleureuse qu’âpre et froide suivant ses humeurs. Puis avait perdu jusqu’à ses mots qu’elle se souvenait pourtant chérir. Son rire, ses souffles et murmures s’étaient silencieusement éteints eux aussi.
Les contours de son corps se sont vite estompés, au point de ne lui laisser pendant un temps que l’image rassurante de son visage, qui se flouta inexorablement elle-aussi.
Elle agonisait de les voir disparaître tour à tour, jour après jour, impuissante, et luttait contre son esprit qui jouait avec elle ce jeu sadique.
Elle aurait voulu s’éteindre avec elle ce jour-là et se demandait si une part d’elle ne l’avait pas déjà fait.
Elle avait cependant repris la route dont cette relation l’avait brièvement détournée. Et ce chemin déjà froid, lui parut encore plus glacial à son retour. A nouveau, elle ne s’était plus souciée d’aucune relation qu’elle créa, se contentant de traverser les âges sans attaches.
Et pourtant, à l’aube de l’oubli total de son amour défunt, elle agonisait encore, maudissant son propre esprit de la torture qu’il lui faisait endurer.
Elle, qui voulait s’attacher à des souvenirs perdus, et lui, qui ne lui permettait de ne penser qu’à cette femme rencontrée il y a peu.
Mais luttant toujours plus, elle refusait de laisser partir ses ultimes souvenirs, tant elle s’était fait le devoir de ne jamais les oublier.
Pourtant elle savait qu’elle allait faillir à ce devoir si cher et cette torpeur faisait sombrer son esprit toujours plus.
On frappa à la porte de son bureau mettant fin à sa tourmente pendant un instant.
La mage, reprenant sa contenance, invita la personne à entrer.
La porte s’ouvrit timidement.
C’était elle.
Elle qui ravissait, dans son esprit, les derniers souvenirs de son ancienne compagne et qui maintenant envahissait son bureau de sa présence solaire. La fougue mêlée d’innocence de son invitée la rendit étrangement nostalgique, comme si son corps se rappelait quelque chose, malgré les efforts de son esprit pour le lui faire oublier. Son regard et son sourire la faisait trembler et elle devait se faire violence pour empêcher ses yeux de s’humidifier.
Alors elle sut.
Elle sut que bientôt elle aurait oublié et que son esprit victorieux ne laisserait à ses regrets que le seul espoir de recommencer à nouveau.
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Merci beaucoup d’avoir lu.
On espère que ça vous aura plu.
Une bonne journée/soirée à vous et portez-vous bien !
A/C
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